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HOMMAGE
HÉLÈNE BIDARD, ADJOINTE (P.C.F) À LA MAIRE DE PARIS
Contre toutes les violences faites aux femmes, pour lier leurs luttes aux combats anticapitalistes, Maya Surduts, décédée à 79 ans le 13 avril, s'engageait avec ferveur. Aucune mobilisation pour l'avortement, contre le viol et la prostitution, contre la loi El Khomri ne s'est faite sans elle. Elle a contribué à forger le mouvement féministe.
Pas une manifestation, pas un rassemblement sur le pavé parisien sans que les féministes ne soient derrière Maya Surduts. Toujours au premier rang, dans l'action, énergique, dans les cortèges du 8 mars, Journée internationale des droits des femmes, du 25 novembre, contre les violences faites aux femmes, et dans toutes les autres mobilisations pour les droits des femmes qu'elle savait organiser avec ses camarades du Collectif national des droits des femmes (C.N.D.F).
SON INTRANSIGEANCE PROVOQUAIT LE DÉBAT PARTOUT OÙ ELLE PASSAIT. ELLE NE LÂCHAIT RIEN ET ELLE AVAIT RAISON.
Elle était présente dans toutes les luttes pour rappeler encore et toujours la nécessaire prise en compte de l'égalité entre les femmes et les hommes et le développement d'un féminisme imprégné de lutte des classes.
La lutte pour le droit à l'avortement a été l'un de ses premiers engagements.
Elle était celle qui dénonçait l'action de tel ou tel commando anti-IVG, qui détectait le moindre dispositif législatif susceptible de porter atteinte aux droits des femmes, qui lançait sans cesse de nouvelles idées pour mettre fin aux violences machistes. Maya rappelait toujours l'importance de la convergence des luttes, si bien illustrée avec les grandes grèves de 1995, lorsque les cheminots rejoignirent les féministes dans la rue le 25 novembre, permettant ensuite la naissance du C.N.D.F.
Elle a mené le combat féministe jusqu'au bout : à la dernière Fête de l'Humanité, aux côtés des militantes de Femmes solidaires, tonnant contre les conséquences de la loi Macron ; à l'automne, organisant un rassemblement de solidarité avec les femmes exilées sur le parvis de l'hôtel de ville de Paris ; en février, à l'Assemblée nationale, aux assises contre la gestation pour autrui (G.P.A) avec Suzy Rojtman, Marie-George Buffet et Laurence Cohen ; et en mars, au Sénat, pour fêter les 60 ans du Planning familial aux côtés de ses camarades des luttes fondatrices, le M.L.A.C (Mouvement pour la liberté de l'avortement et de la contraception) et la C.A.D.A.C (Coordination des associations pour le droit à l'avortement et à la contraception) ; jusqu'au 6 avril où, enfin, elle a pu se réjouir de l'adoption de la loi pour l'abolition du système prostitutionnel, symbole de l'exploitation et d'une domination patriarcale d'un autre âge, une loi pour laquelle elle a tant œuvré à rassembler les associations féministes et à convaincre les élu-e-s.
À l'heure où de nombreuses conquêtes restent à faire et où les reculs sont beaucoup trop fréquents, Maya Surduts se souciait de la relève des féministes et notamment celles engagées dans la lutte des classes. Comment organiser les luttes d'émancipation des femmes quand elles sont déjà tellement aux prises avec la violence et la précarité ? Pour Maya Surduts, la révolution ne pouvait se faire sans les femmes et les femmes ne pouvaient s'émanciper sans se battre, dans le même temps, contre le système patriarcal.
Aujourd'hui, en France, les inégalités entre les femmes et les hommes restent constitutives de l'organisation de notre société capitaliste. Le travail précaire des femmes, les CDD, les temps partiels, les salaires féminins très bas servent à précariser l'ensemble du monde du travail. Si elle était adoptée, la loi El Khomri précariserait encore plus les femmes. Maya en était extrêmement inquiète. Les femmes subissent plus fortement la violence sociale, mais elles subissent aussi les violences patriarcales. Harcèlement sexiste et sexuel dans la rue, viols, violences conjugales... en moyenne, une femme décède en France tous les 2,5 jours, tuée par son conjoint ou son ex-conjoint.
Aujourd'hui, les potentialités sont là, de nombreux mouvements féministes agissent, des femmes luttent dans leurs entreprises même si elles sont souvent rendues invisibles , des associations et des collectifs de jeunes féministes s'organisent contre le harcèlement de rue, contre les violences...
La relève est là et, pour toutes celles et tous ceux qui ont eu la chance de la côtoyer, nous garderons de Maya Surduts une énergie militante insaisissable pour mener partout le combat pour l'égalité, pour un féminisme politisé et porteur de potentiels révolutionnaires.
Article paru dans l' l’humanité du 21 avril 2016