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24 avril 2008 4 24 /04 /avril /2008 15:29
FESTIVAL
DES RESISTANCES

Pour ne rien enterrer de nos Utopies

faisons de ce 1er mai 2008, le tremplin des résistances de demain.

 

PROGRAMME



AU   DEPART DE LA GARE 

·                  10h  Manifestation festive

 

PLACE DU PALAIS DES PAPES

 

·                    12h  Pique-nique tiré du sac

 

·                    14h  Théâtre forum avec Vies à vies

(Situation proposée : Vivre ici et aujourd’hui sans papiers )

 

·                    15h  Sieste militante

 

JARDIN D’ UTOPIA


16h       Expos, Affichages,

Actions militantes sur Avignon

                       Tribune d’expression libre, Action Caméras…

18h      Projection au cinéma "UTOPIA"

« Etrange, étranger »

 

Débat en présence des réalisateurs M. TRILLAT et F. VARIOT.

 

 

A partir de 20h30 
PARC DES LIBERTES,
LA BARTHELASSE

Repas, Concerts,  Bal populaire,  expos, stands inter associatifs,
tribunes d’expression libre, actions théâtrales, bœufs….

 

 (Réservation pour repas directement au Parc des Libertés, TEL: 04 90 85 17 73) 
             salades 3,50 €       plat du jour 7,50 €       menu 11 €  

Résistance Action Culture Association loi 1901.

Collectif de militants associatifs et politiques

qui invitent la fête dans la résistance.

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24 avril 2008 4 24 /04 /avril /2008 13:34

Je ne sortais quasiment plus de l'appartement, Montpellier la ville que j'aimais le plus, cette cité pour moi synonyme de bonheur et d'émancipation me ramenait sans cesse au souvenir de Frédéric. L'été était chaud, je tenais les volets clos, ne laissant entrer qu'un mince filet de lumière. Cette période dura trois mois et un peu plus. La peine n'arrivait pas à s'atténuer et je ne pouvais toujours pas faire de projets. Il y avait une seule idée qui commençait à me trotter dans la tête : partir. Pour où, je n'en savais fichtre rien mais je comprenais bien que je ne pourrais plus demeurer dans ces lieux trop chargés émotionnellement. Je n'avais pas non plus d'idées sur ce que je pourrais faire...


 Je ne sais pas ce que je serais devenu sans le platane de la RN 86, peut-être aurai-je fini sous la même poutre que Frédéric. Rien n'est sûr mais je dois bien avouer que plusieurs fois, l'idée m'a effleuré l'esprit. Je ne peux pas dire ce qui m'a retenu...

Puis un jour il y a peu de temps mon téléphone sonna. Machinalement j'allai répondre, c'était la gendarmerie de Bagnols sur Cèze qui m'apprit, non sans délicatesse, que mon père venait de se tuer sur la route.


Voilà les circonstances qui m'ont conduit à revenir, ici à Saint-Saturnin le Pont. Un cycle vient de se boucler à Montpellier et (merci papa !), j'ai eu l'opportunité d'en partir pour revenir ici au pays natal.

Ce retour ne m'enchante pas plus que ça mais il me permet au moins de fuir. Puis ce n'est pas une marche arrière complète pour la bonne et simple raison que l'homme qui empêchait mon épanouissement, mon père, est mort.

 Saint-Saturnin n'a plus la même signification. Ce n'est plus le lieu d'interdiction, de castration, d'étouffement que j'ai connu autrefois, ça devient une sortie de secours à cette situation intenable dans la ville qui m'a vu devenir un homme.

Il avait tort le parternel, c'est utile d'écrire son journal. Sans cette réflexion, je ne me serais certainement pas rendu compte que depuis toujours Saint Saturnin est une ouverture, un passage obligé, et non comme je l'ai cru longtemps une prison, un enfermement. D'ailleurs quand on entre dans la ville par le côté nord, on peut lire sous le panneau d'entrée dans l'agglomération, un second panneau qui porte la mention « Portes d'or de Provence ».

Cet intitulé m'a toujours paru étrange. En effet, Saint-Saturnin, se trouvant sur la rive droite du Rhône, n'est donc pas en Provence. De plus, comme la ville jouxte la limite de quatre départements, on pourrait presque se revendiquer ardéchois, drômois ou vauclusiens mais il se trouve que l'on est gardois à quelques hectomètres près. Alors pourquoi pas être la « porte d'or de la Provence » ? Puis ça fait bien sur le dépliant de l'office du tourisme ! A Montélimar, ils ont le nougat, alors ils n'ont pas besoin d'en rajouter sur leur C.V. mais nous qui n'avons rien ou presque, il faut bien se faire mousser un peu, non ?  Ici personne ne sait vraiment à quel territoire réel la région appartient, à tel point qu'à la création de ce machin qu'est la Communauté de Communes, les élus ont cogité longtemps pour trouver un nom qui soit parlant. Je ne crois pas qu'ils y soient arrivés. De toute façon, nous n'avons pas besoin d'une notoriété supplémentaire, il y a assez de culs blancs qui viennent bronzer chez nous l'été.

Bien qu'étant d'origine alsacienne, les hasards des affectations de mon père font que j'ai toujours vécu ici. Je suis pas un vrai « couleur locale » mais les quelques rares vrais autochtones ont-ils conscience de leur identité culturelle ? La langue régionale, par exemple, qui est l'occitan est  pratiquement perdue. Les quelques résistants qui n'ont pas bouffé leurs racines s'entre-déchirent pour savoir si c'est du provençal ou du patois. Quand certains poussent l'audace jusqu'à la lire ou l'écrire, d'autres polémiques se font jour pour le choix de la graphie. Ah, vraiment je sais pas si le terme de « Portes d'or de Provence » a un écho pour quelqu'un d'autre que le touriste moyen qui doit comprendre le message comme un « bienvenu au pays du soleil » !

 Mais une fois le panneau passé, notre vacancier doit déchanter car Saint-Saturnin, comme toute les villes traversées par une nationale, a des maisons vieilles, noircies par le trafic et le plus souvent désertées par leurs habitants à cause des nuisances sonores. Avant la fin de l'agglomération, vous aurez droit à votre petite ZAC avec vos moyennes grandes surfaces, vos magasins de bricolage aux enseignes bien connues dans l'Europe entière. On en sort comme dans tous les patelins de France par un de ces ronds-points Houdard, inventeur génial de la priorité à gauche, qui, comme ses petits frères parsemés sur tout le territoire, rivalise d'imagination pour exhiber une décoration typique du secteur. C'est ainsi que l'on trouve un monticule de terre, censé représenter un champ avec un maset, une vigne et un olivier. Sachant que le vin ne se vend plus et que l'olivier, il faut le changer régulièrement car des gens malintentionnés l'arrachent pour le replanter dans le petit jardin de leur pavillon en lotissement, ah, elle est belle la porte d'or de la Provence ! On peut même dire qu'elle a les gongs qui grincent.

 Et pourtant..., c'est vrai qu'à la grande époque de la batellerie sur le Rhône, c'était une étape importante et que son pont remonte à loin. Dans le poème du Rhône de Frédéric Mistral, l'épisode tragique qui s'y déroule marque bien le début de quelque chose et la fin d'une autre. Qui connaît cette œuvre à Saint-Saturnin ? Qui a lu Mistral (en général) ? Certains s'en revendiquent, ou le citent régulièrement (c'est si facile de faire parler les morts), il a été statufié de son vivant, mais, mis à part la fausse image que l'on véhicule, Mistral est un inconnu célèbre. Avoir une notoriété factice, c'est quelquefois pire que d'être tombé dans l'oubli.


Rien ne me prédestinait, moi le petit alsacien, à m'intéresser à cette littérature et pourtant, sans arrière pensées, pas plus que d'a priori ni connaissances, je suis tombé un jour à la bibliothèque sur « le poème du Rhône ». Je devais avoir une quinzaine d'années un âge où on s'intéresse à tout sauf à ça. Malgré la barrière de la langue, gros obstacle et, second écueil de taille, la forme bien éloignée du roman moderne que j'avais l'habitude de lire, je venais de mettre un pied dans la littérature occitane. Je ne le savais pas encore, et c'est tant mieux car quand on commence à intellectualiser trop ses lectures, on en perd le plaisir instinctif.

Tranquillement, pendant mes années de lycée, je m'étais un peu plus familiarisé à la langue et aux autres écrivains occitans mais sans trop y prêter attention. A mon arrivée à Montpellier, j'avais poursuivi dans ce sens au côté de mes études de lettres, qui, elles, étaient un enseignement sérieux dans une littérature universelle en langue françoise. Les textes en langue d'oc étant considérés, bien entendu, par nombre d'enseignants et par leurs élèves comme des écrits patoisants sans aucun intérêt littéraire.

Cette vision réductrice des choses ne m'avait pourtant pas découragé et je peux dire que, plus le temps passait, plus je faisais le choix culturel d'une « occitanitude » assumée. Malgré mon nom patronymique, le berceau alsacien de ma famille, je me reconnaissais dans l'histoire, la langue, la culture, la littérature du territoire auquel j'appartenais. On a bien des Chrétiens qui se convertissent à l'Islam ou au Bouddhisme, des nomades qui deviennent sédentaires, des ruraux qui se transforment en citadins épanouis et vice-versa, alors pourquoi ne pourrions-nous choisir notre culture ? Dans le même temps, se reconnaître dans une civilisation millénaire, serait-ce plus ringard que d'aller fumer des joints à Katmandou comme c'était à la mode à une époque ?

Me voilà donneur de leçons mais moi-même je n'ai rien fait pour perpétuer l'alsacien, j'ai donc moi-aussi mon combat exotique en quelque sorte...


Peut-être qu'aujourd'hui je me représente les choses ainsi, ne serait-ce que pour me convaincre que j'ai fait le bon choix en prenant la décision d'un retour à Saint-Saturnin. De toute façon avais-je bien le choix ? Je ne veux plus rester à Montpellier, cette perspective me fait trop souffrir et de toute façon, je n'ai plus rien à y faire. J'ai mis un terme à mes études, j'y suis maintenant seul et même dans le cas contraire, je n'aurai plus les quelques subsides que me versait mon père qui me permettaient de compléter mes maigres revenus. A court terme, je devrai me séparer de l'appartement. Ici à Saint-Saturnin, je serai logé pour rien car je vais récupérer le pavillon paternel dont les dernières traites sont remboursées depuis belle lurette. Je suis sûr qu'avec les économies que mon père mettait de côté chaque mois, (même si l'aspect financier était un des tabous familiaux donc secret), je pourrai voir venir quelques temps.

Sans vraiment de perspective, je dirais même dans une phase de renoncement, je pourrai au moins pendant une certaine période, continuer à me complaire dans ce spleen qui est le seul compagnon de mes jours.

Par fidélité à Frédéric, je souhaite renoncer  à l'amour. Je ne veux plus recommencer les pratiques sexuelles que j'ai connues avant, et qui sont courantes  dans la communauté gay. A part un assouvissement  instinctif qui au mieux soulage nos corps, ce ne sont que des occasions de contamination.

Je ne veux pas finir comme lui ; si telle avait été ma volonté profonde, dans le trimestre qui vient de s'écouler, je serais passé à l'acte. Or, je ne l'ai pas fait.  J'ai vécu des choses trop belles pour revenir à de simples ébats sans sentiment. On doit bien, à un moment donné, être capable de transcender. Etre en mesure de dominer son corps. J'en suis capable, j'en ai la conviction profonde. J'ai toujours eu une sensibilité pour la littérature en général et la poésie en particulier, et Frédéric a aggravé ce penchant de ma personnalité, je dois donc pouvoir sublimer mes pulsions...

Me voilà donc, seul, dans la maison qui fut celle de mon père jusqu'il y a trois jours. J'en suis le seul héritier, il faut que j'en prenne possession. Tout, le mobilier, la décoration, l'atmosphère, sentent encore le gendarme Eggimann. J'ai ouvert mon ordinateur portable pour écrire sur la table du salon, je n'ai qu'à lever les yeux pour apercevoir le vaisselier transformé en meuble d'exposition pour sa collection de revolvers et de pistolets. Il n'y a qu'un bidasse pour avoir ce genre de hobby ! Réunir des engins de morts, quelle drôle d'idée ! Pour moi le seul objet qui tire en 35 mn et qui ait un barillet (et même parfois deux), ce n'est pas une arme à feu mais... un appareil photo. Si j'étais fétichiste comme feu mon père, je regrouperais des Leica mais je préfère prendre des clichés plutôt qu'amasser des boîtes.

 Il me faudra du temps pour que ça devienne mon territoire à part entière. Des cloisons vont sûrement tomber ; quant aux armes à feu, je saurai vite combien elles valent...

La journée a été éprouvante, le protocole, la messe, le cimetière, les poignées de mains, les condoléances et ... moi, sec, sans une larme, sans le moindre chagrin pour celui qui m'a donné la vie alors que j'ai été si affecté par le décès de Frédéric.

J'aurai du mal à trouver le sommeil, c'est comme ça depuis le départ de Frédéric. J'ai toujours entendu dire que la nuit est angoissante, je comprends maintenant ce que veut dire cette expression. Je vais, comme tous les soirs depuis plus de trois mois, passer de longues heures à surfer sur la toile. J'ai écrit que je refuse tout contact physique mais j'ai besoin de rencontres virtuelles. Je ne visite pas les sites hards mais les tchats, les sites de discussion, d'échanges de vécu ou d'expérience, ça remplace aisément le psy dont j'aurais certainement besoin ces temps-ci.

J'en fréquente plusieurs mais j'ai mon préféré avec notamment un internaute qui a beaucoup d'humour. Le pseudo derrière lequel il se cache, est la Tante Marie-Sybille. Ses récits sont à hurler de rire, enfin la plupart du temps ! Comme je n'ai pas toujours l'occasion de me gondoler, c'est le moins que l'on puisse dire, je lis avec délectation et régularité les aventures de la Tante Marie-Sybille et sans doute je revis des épisodes de mon existence.


Le dernier épisode s'intitule : Mes années collège

 

         Chers amis homos ou amis des homos, vous vous posez tous la question quand les pédés se rendent-ils compte qu'ils le sont ? et vous comptez tous sur votre tante Marie-Sybille pour vous apporter la réponse.

Il faut pour cela que je vous raconte mes années passées, il y a maintenant quelques temps déjà, au collège. Ceux qui me connaissent, auront du mal à le croire, j'ai été un petit garçon fluet et mignon à mon entrée en sixième. A cet âge là, il y a encore beaucoup d'innocence et les amitiés avec les filles ne posent pas encore trop de problèmes. Les gars les plus virils tapent avec entrain dans des ballons qui ne s'en plaignent pas et les plus calmes, les plus posés, les intellos, et les futurs homos jouent à autre chose mais ils ne sont pas encore la risée de leurs camarades. Qu'ils en profitent, ça ne durera pas.

Un an plus tard, je ne sais par quel miracle, j'étais passé dans la classe supérieure à savoir la cinquième. C'est bizarre, au collège, c'est le contraire du levier de vitesse d'une voiture, plus on avance dans le temps, plus le chiffre est petit. Je ne sais si j'avais pris conscience de mon homosexualité, mais en tout cas je crois que mes professeurs, sans le dire bien sûr, avaient dû s'en rendre compte. Il y avait deux détails qui ne devaient pas passer inaperçus. Le premier était relatif à mon apparence : j'avais adopté un nouveau look et notamment j'avais pris l'habitude de m'épiler les sourcils. Avec une vingtaine d'années de recul, je pense que cette dernière pratique, pas forcément bien maîtrisée ne laissait personne indifférent. La seconde habitude préfigurait mon goût pour l'art et la décoration. Avant de rendre mes devoirs et copies faits à la maison, je prenais soin de les parfumer comme on le fait parfois pour les lettres et ces mêmes feuilles étaient soigneusement remplies avec des stylos et feutres de toutes les couleurs. Si le fond n'était pas forcément profond, la forme, elle, était unique dans le groupe voire le collège dans son entier. Quoiqu'il en soit, ça m'a permis de franchir le nouvel obstacle et d'aller user mes fonds de culottes dans la classe supérieure.

L'année de quatrième est mémorable car c'est l'époque de ma mue. Auparavant nous avions tous de belles voix d'enfants, nous aurions tous pu doubler les petits enfants à la croix de bois mais voilà, patratac, les hormones s'en sont mêlées et ce fut la fin de l'époque prépubère. Hé les obsédés : j'ai dit prépubère, je n'ai pas parlé de prépuce ! ! ! Comme nous étions laids, avec nos voix de chèvres et nos boutons d'acnés. Pourtant, je crois bien que c'est à cette époque, que ça a démarré réellement pour moi, mais je n'en dis pas plus. C'est mon jardin secret.

Je devais quand même commencer à me faire un peu trop remarquer car l'année suivante, heureusement la dernière au collège, j'ai fini par avoir des ennuis. La troisième, c'est vraiment la classe où les petits machos se sentent obligés d'étaler leur masculinité de façon outrancière pour prouver qu'ils sont des vrais mecs avec des c........ Moi, qui n'ai de masculin que le prénom, je ne tardais pas à être la cible des quolibets et autres moqueries de quelques petits caïds. J'essayais de me faire tout petit mais je n'y arrivais pas forcément. L'incident arriva pendant une séance de sport. Nous étions, tous les garçons à nous changer dans le vestiaire. Le professeur se trouvait à l'extérieur. Je venais de quitter mon pantalon pour enfiler un short et c'est à ce moment là que les remarques commencèrent à fuser sur ma personnalité, mon attitude, mes manières. Chacun voulant en mettre une couche de plus que son voisin, on finit par sortir d'un placard un manche à balai qu'un trio composé de trois apprentis nazillons menaçait de me... Vous avez compris la suite. Je ne sais s'ils seraient allés jusqu'au bout de leur intention, en tous cas je n'ai dû mon salut qu'à l'intervention d'un camarade de classe, dont l'hétérosexualité ne faisait aucun doute aux yeux des autres, et qui, du haut de son mètre quatre-vingt, promit son poing dans la gueule au premier qui ferait un pas de plus. Les autres protestèrent que l'on ne pouvait plus rigoler, qu'ils ne l'auraient pas fait... Personne n'est capable de dire, si au lieu de les freiner, on les avait encouragés comment ce petit jeu se serait terminé...

Vraiment il était temps que s'arrêtent mes années collèges !

Dans un prochain épisode mes années lycée ou de nouvelles aventures de tante Marie-Sybille inédites à découvrir sans modération...

 

                                               Signé : Marie Six Billes



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23 avril 2008 3 23 /04 /avril /2008 13:40

Chap. 2 : « Le grand jeu » 


Un silence de plusieurs semaines et me voilà attelé de nouveau à l'écriture de ce journal. Juste le temps d'aller toucher le fond de la piscine puis de remonter progressivement en respectant les paliers de décompression. Je n'ai pas terminé le travail de deuil pour la perte de Frédéric, tout comme je n'ai pas fini de ressasser tous ces ressentiments sur mon père que je n'ai ni pu ni voulu lui exprimer de son vivant.

Cependant, des étapes ont été franchies et maintenant je suis à peu près en mesure d'affronter la vie. Et quitte à le faire, autant ne pas se figer dans les souffrances passées et sortir « le grand jeu » pour reprendre le titre d'un recueil de Benjamin Péret qui sera l'une des choses importantes que m'aura apporté Frédéric. En effet, j'ai pris la décision de vivre comme je l'entends, faire ce dont j'ai le plus envie et puis surtout m'investir dans quelque chose afin de fuir mes démons, mon passé, ma solitude.

Bien sûr rien ne me fera oublier les souvenirs heureux vécus auprès de Frédéric mais justement en me donnant à fond à une activité, cela permettra que ne demeurent que les bons moments et que soient occultés les autres.

Il m'a fallu cette période pour aujourd'hui envisager la vie sous cet angle et choisir une voie. Rien n'a été facile car au-delà de mon chagrin et de mon tourment, j'ai dû m'occuper de la succession de mon père. C'est fou le nombre de démarches administratives et de papiers à remplir. Au fur et à mesure j'ai pris conscience d'une chose que je savais déjà mais qui devenait plus évidente maintenant : une personne illettrée ou analphabète est incapable de sortir seule de ce dédale kafkaïen. Finalement la perspective s'est imposée à moi. Ne sachant rien faire de particulier : une licence de lettres modernes, on ne peut pas vraiment dire que ça soit la formation idéale à un métier, la seule compétence que je pourrais me vanter d'avoir ce serait peut-être de savoir écrire. Ecrivain public, c'était une évidence. Les quelques économies que me laissait mon père, en plus de son petit pavillon me permettraient de me doter d'un matériel informatique et de louer un local commercial. Pour la clientèle, elle ne devrait pas manquer avec tous les gens qui ont des difficultés à Saint-Saturnin. Plus j'y pensais, et plus je trouvais l'idée bonne. L'occasion me serait donner de rencontrer des gens, de faire du social, d'être néanmoins indépendant, je n'y voyais que des avantages. Il me restait à concrétiser ce désir. Le lotissement où mon père avait sa maison étant trop excentré, il me fallait un local dans le cœur du village. Je pensais trouver sans trop de mal car entre la mort du petit commerce et la fuite des magasins vers les zones commerciales, il devait sans doute y avoir plus d'une possibilité. Mes besoins étaient modestes, une pièce d'une quinzaine ou d'une vingtaine de mètres carrés auraient pu convenir.

Je n'ai pas cherché longtemps. Une promenade dans les quartiers historiques a suffi. Une annonce sur une baie vitrée a attiré mon regard. Sur le coup je ne me suis pas souvenu quelle était la fonction de ce bâtiment. En m'approchant ça m'est revenu. C'était l'ancien siège du Parti Communiste enfin de ces représentants locaux, je n'allais pas faire l'acquisition de la Place du Colonel Fabien. Je ne sais si ce sont ses finances qui étaient en berne, ou si l'activité était plus réduite mais toujours est-il qu'ils ne reconduisaient pas leur bail. A la réflexion, j'avais toujours vu cette permanence politique qui sur sa façade avait un panneau de bois où l'on pouvait lire en lettres rouges : « Parti Communiste Français ». La pancarte avait à ses deux extrémités une faucille et un marteau entrelacés. Dans la vitrine, on pouvait toujours voir des affiches changées au rythme des élections ou de l'actualité sociale et politique. Mon père, en bon militaire et alsacien avait horreur des communistes, mais moi, même si ma conscience politique n'était pas des plus affûtée, ils ne me dérangeaient pas. Mieux, j'aurais pu, si j'avais exercé mon devoir civique régulièrement, voter pour eux. Quand on est pédé, on a pas forcément envie d'être du côté des plus forts...

De toute façon, le local n'appartenait pas au P.C. mais à une famille, qui devait y adhérer, mais qui accepterait sans doute de louer à n'importe qui. La demande n'est pas si forte en ce moment. J'en eus vite confirmation. Le loyer était bon marché et l'emplacement, au cœur de la vieille ville, c'est à dire au contact de nombreuses familles défavorisées et/ou immigrées, les conditions me semblaient idéales. L'affaire a été rondement menée. Il suffirait d'un coup de blanc sur les murs, à la place de la pancarte avec le marteau et la faucille, je voyais déjà l'écriteau : « Ecrivain public : lettres-type : tous types de lettres ».


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C'était, il y a une semaine, finalement j'ai opté, pour une formule plus sobre : « écrivain public : lettres, mémoires, travaux de secrétariat, photocopies »  L'accroche est moins poétique mais semble plus explicite. Les cocos m'ont laissé une photocopieuse encore en état de marche avec l'ordinateur dont je viens de faire l'acquisition, je suis prêt à faire du bon boulot. Il ne me reste qu'à attendre le client. J'y crois : il doit bien y avoir des gens qui ne s'en sortent pas avec la paperasse administrative pour leur déclaration d'impôt, leur dossier de retraite, ou pour un contentieux inhabituel avec une administration ou un commerce. Des chômeurs ont sans doute, besoin de curriculum vitae, de lettres de motivation ou de demandes écrites à faire aux Assedic ou à l'ANPE. Peut-être aurai-je la chance de rédiger une lettre enflammée pour un amoureux transi incapable d'aligner trois mots ou le récit d'une vie, une sorte de roman à usage familial comme c'est devenu la mode de nos jours ?

 Enfin ça sera la surprise demain matin à l'ouverture. Pour l'instant, j'ai passé ma dernière journée, après les travaux de remise en état à distribuer dans les boîtes aux lettres de la ville, une petite publicité afin de me faire connaître. Je n'ai plus qu'à croiser les doigts. De toute façon, si ça ne marche pas, dans six mois, j'arrête et je réfléchis à autre chose, j'ai de quoi voir venir d'ici là.


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La matinée a été plus que calme... je n'ai vu personne. Je l'ai mise à profit pour faire quelques petits papillons pour coller sur la vitrine afin de bien annoncer les prestations que je peux offrir. Je suis allé manger à la maison et à mon retour j'ai vu de loin un vieil homme qui semblait attendre devant la boutique. J'ai pressé le pas pour ne pas le faire patienter plus. A vue de nez, c'était un octo voire nonagénaire et effectivement il venait bien me voir. Je l'ai fait entrer et prendre place sur une chaise face à mon bureau. En passant de l'autre côté, j'ai pu l'observer mieux : c'est un homme de condition modeste aux habits propres mais ordinaires et anciens. Le seul luxe qu'il affiche : un cigare. Pas un havane mais une sorte de cigarillo, c'est dire si le terme « cigare »  n'est pas forcément le bon. Un de ces Ninas qui pue et dont l'odeur imprègne la pièce à une vitesse record. En cherchant désespérément du regard un cendrier que je n'ai pas prévu dans mon mobilier, me revient un vers de Benjamin Péret tiré du poème « le sang répandu » que citait régulièrement Frédéric quand nous fréquentions un lieu où le tabagisme n'était pas prohibé : « La cendre qu'est la maladie du cigare imite les concierges descendant l'escalier ».

Un verre Pyrex fera l'affaire. Je suis prêt à l'écouter.

Il commence à m'expliquer dans un français assez approximatif qu'il a eu ma carte dans un bistrot de la ville. Je m'inquiète un peu : est-ce qu'il a tapé à la bonne porte ? Connaît-il réellement le rôle d'un écrivain public ? Je commence à en douter. Déjà j'imagine des stratégies pour pouvoir lui indiquer d'autres lieux où l'on pourra entendre ses problèmes.

De son côté, il n'a aucune hésitation sur mes activités. Il me fait part de sa joie de pouvoir régler son problème avant de mourir. Sans me connaître, il me fait entièrement confiance : au moins une bonne raison d'avoir ouvert ma boutique ce matin !

Il commence à me raconter son histoire. Il n'est pas toujours cohérent, il s'adonne à des digressions assez alambiquées qui s'ajoutent à sa diction de vieillard et à son accent qui parasite la clarté du message.

Au bout d'un moment j'en ai retenu ce que je pense être l'essentiel.

Mon premier client s'appelle Ramon Gonzalez, il est né en 1920 en Espagne plus précisément dans les Asturies, (il y tient) : c'est un maçon à la retraite. Le reste de notre conversation ne me permet pas de lui soutirer des infos qui me semblent exploitables. Plus je discute avec lui et moins je n'arrive à me faire une opinion : est-il gâteux ? ne se fait-il pas suffisamment comprendre en français ? ou tout simplement a t-il tapé à la mauvaise porte comme je le crains depuis le début ?

Finalement dans un magma de paroles au sens flou, je finis par entendre qu'il est à la recherche de sa fille. Je me dis enfin qu'il est venu pour que je l'assiste pour rédiger un courrier afin de prendre contact avec sa descendante, ou tout simplement pour l'aider à l'appeler au téléphone mais à ce moment là je le perds à nouveau. Il a glissé tranquillement depuis le début de notre échange du terme «écrivain public», à  «écrivain privé» pour atteindre un inattendu «détective privé».

Je laisse tomber notre discussion pour lui expliquer que je ne suis en aucun cas un détective privé. Il ne me comprend pas. Il part dans un monologue sur la défense du service public et fait référence au local que j'occupe. Je me doute qu'il fait une allusion aux anciens locataires du lieu, les communistes qui selon ses mots, ont toujours défendu le service public. Le fait-il exprès ou bien est-ce une réelle confusion ? Toujours est-il que je n'arrive pas lui faire entendre que mon travail est très limité. Il me coupe sans arrêt la parole sans vouloir m'écouter. On dirait qu'il prend mes mots pour de la modestie qu'il écarte par une formule qui revient sans cesse dans sa bouche :


«J'ai confiancé en toi, jo sais que tou y arribaras».


Je n'arrive pas à lui faire comprendre ce que je suis. Déjà il se lève. Il fait passer sa canne qu'il tenait dans sa main droite vers la gauche puis fouille sa poche pour en sortir un portefeuille. Il l'entrouvre dans un geste tremblant et en sort un billet de 500 euros. Il le pose sur mon bureau malgré mes protestations. Je me hâte de passer de son côté pour lui rendre son billet mais il a déjà tourné le dos et s'avance vers la porte. Avec sa canne, il a anticipé mon mouvement et me rejette d'une poussée qui n'est pas agressive mais qui me tient en respect.


«Tou prends cet argent, jé reviendrais té voir bientôt. »


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22 avril 2008 2 22 /04 /avril /2008 07:05

Je ne peux m'expliquer ce qui m'a empêché de lui rendre son bifton. Pas la malhonnêteté, ça c'est sûr, peut-être le sentiment que je ne pouvais décevoir ce vieux.  De toute façon, il ne fait aucun doute dans mon esprit que d'une façon ou d'une autre, je vais lui rendre son pognon. Il est hors de question que je prenne les billets des vieux qui perdent les pédales et pourquoi pas arracher les sacs à main des mémés tant qu'on y ait ? ! ?

Je le regarde marcher dans la rue. Il est vraiment très vieux et semble trop modeste dans ses manières, ses vêtements et ses paroles pour donner en étrennes des billets de 500 euros à n'importe qui et à n'importe quelle occasion. Je n'en reviens pas. Il s'éloigne et tourne au coin de la rue. Je ne suis pas très sportif mais je pourrais le rejoindre en courant et lui rendre son fric. Je ne sais pas pourquoi je me l'interdis. Je rentre dans la boutique et me jette sur l'annuaire. Il n'y a pas de Gonzalez Ramon à Saint-Saturnin. A la réflexion, je n'ai jamais bien fréquenté le village avant de partir à Montpellier mais son visage ne me dit rien ; ça n'a pas valeur de preuve, je ne connais pas tout le monde ici et ne suis pas des plus physionomistes.

Le calme revenu dans mon bureau je me surprends à fredonner la chanson de Léo Ferré « les anarchistes » : Y'en a pas un sur cent et pourtant ils existent / la plupart espagnols allez savoir pourquoi / Faut croire qu'en Espagne on ne les comprend pas / Les anarchistes...


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Pour une première journée, il s'en sera passé des choses ! Finalement je n'ai pas beaucoup de perspectives, de travail, de plus je suis d'un naturel assez curieux alors pourquoi ne pas en savoir plus sur ce drôle de type qu'est Ramon Gonzalez. Je voulais me lancer dans le métier d'écrivain public pour rencontrer du monde, m'ouvrir aux autres, je crois que c'est réussi. Puisque c'est lui qui veut que je sois détective privé, eh bien menons l'enquête et à moi les aventures !

         Le soir venu, de retour à la maison, je repense à cette curieuse rencontre. Une énigme pour le moment mais qu'il faudra élucider. Soit le vieux est sénile et j'abuse de sa démence à prenant son argent et mon honnêteté m'oblige à le lui rendre. Soit, seconde hypothèse, malgré son âge, il reste encore lucide et, dans ce cas-là, je me dois de l'aider car c'est vers moi qu'il s'est tourné, même si sa démarche volontaire a été, un peu guidée par le hasard. C'est promis, demain matin, je dois me mettre au travail pour avoir des réponses à mes interrogations.


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         Je me suis réveillé avec les mêmes dispositions qu'au coucher. Sitôt au pied du lit, juste le temps de me faire une beauté et me voilà parti à la recherche du vieil espagnol. Je décide d'aller prendre  mon petit déj au café de la Bourse. Je me suis mis dans l'idée que pour retrouver sa trace, un bistrot serait le meilleur endroit. Je n'ai jamais été un pilier de bar mais la Bourse se veut un établissement un peu chicos. Pas un repère pour habitués alcooliques qui n'ont que ce lieu pour lutter contre leur solitude.

En y entrant, c'est la remarque que je me fais. Si la piste du café est correcte, je ne tape pas forcément à la bonne porte car Ramon Gonzalez n'a pas vraiment le profil de la Bourse. En fait, c'est moi qui appréhende d'aller dans un boui-boui de peur de me faire chahuter. Je me rassure en me disant que les garçons de café connaissent beaucoup de gens. A l'heure à laquelle j'arrive, la Bourse est vide. Les gens qui se jettent un noir avant le boulot sont déjà partis et les autres clients viennent plus tard dans la matinée ce qui me laissera plus de loisirs pour cuisiner le garçon.

Je ne sais pas m'y prendre, c'est la première fois. Je ne sais pas ce que le garçon va penser et l'idée me gêne. Finalement, pendant que je bois mon café en mangeant un croissant avec trop de beurre à mon goût j'observe l'employé qui derrière son comptoir vide le lave-vaisselle.

 J'attends le moment propice où il me semblera disponible pour converser un instant. Je me rends compte que le travail de détective ne s'improvise pas et même si on l'a vu faire à la télé, ça reste de la fiction.

Au bout d'un moment, je me sens obligé de reprendre un second jus pour faire durer ma présence. Il finit par prendre le temps d'ouvrir l'Equipe et de la lire sur le comptoir. Si j'avais conservé mes références sportives, je pourrais lui parler du match de la veille ou de celui du lendemain mais l'abandon du sport fait parti pour moi de mes actes d'émancipation. Ca m'aurait pourtant été bien utile dans la circonstance. Heureusement, c'est lui qui m'interpelle sur les malheurs du Real Madrid. L'occasion est trop belle ! On s'échange des banalités, je suis bien incapable d'entrer dans le détail puis au bout d'un moment je lui glisse le nom de Ramon Gonzalez en faisant croire que je le connaissais comme un fidèle supporter. Le garçon, malgré une description précise, ne voit pas de qui il s'agit.

Il finira par m'avouer que le bar des sportifs c'est plutôt, comme son nom l'indique, le bar des sports.

Me voilà embarqué pour un second café. Heureusement que je ne suis pas au cognac ! Les deux bistrots ne sont pas très éloignés l'un de l'autre mais les univers sont très différents. Autant le premier peut se faire passer pour une brasserie, autant le second est plutôt un bistrot à pastis. Plus de garçon de café mais un patron sans uniforme qui boit et fume autant que ses clients. Son bistrot, c'est son élément, il y est comme un poisson dans l'eau. Du coup l'ambiance est moins feutrée.

Toujours aussi peu de monde en ce début de matinée, on est encore loin de l'heure de l'apéro. La télé marche assez fort et le patron, sans me connaître le moins du monde, me commente les informations. On peut parler, à juste raison, de propos de café du commerce. Les affaires politiques, les faits divers, la météo, tout est prétexte à dire des « conneries » dont le patron semble coutumier et qui doivent faire le bonheur de sa clientèle. On dirait qu'il se prête à un véritable « one-man-show ». J'aurais du mal à lui donner la réplique mais il s'auto-alimente sans que j'ai à faire les transitions.

Péniblement, j'arriverai à l'amener à Ramon Gonzalez..., après avoir réfléchi il finit par me dire qu'il pense savoir qui c'est mais qu'il est plutôt un habitué du P.M.U. J'en suis à mon quatrième café, je dois avoir une haleine de chacal.

Me voilà parti pour le P.M.U., et comme le temps a passé, je vais finir par arriver pour l'heure de l'apéro. Les deux établissements sont rapprochés : Saint-Saturnin est trop gros pour être un village mais encore trop petit pour se prendre pour une ville. Il n'y a que le maire pour croire ou laisser croire à une importance dans le secteur.

 A mon entrée dans le bar, je ressens déjà un autre climat que dans les deux précédents débits de boisson. La télé géante crache sa course de canassons dans une espèce d'indifférence relative. Les hommes au comptoir ont les yeux sur leur bière et les oreilles à la conversation avec leur voisin avec, cependant, à intervalles réguliers, un léger mouvement d'épaules vers l'écran. Personne ne semble faire attention à mon arrivée. Pour faire couleur locale et m'enlever le goût du moka, je commande un panaché. J'ai l'impression par cette boisson de me fondre dans l'ambiance. Les chevaux passent la ligne d'arrivée, un gars au bout du comptoir en « chambre » un autre qui ne s'en afflige pas.

 Je voudrais bien faire semblant de m'intéresser à la course mais mes connaissances en la matière sont nulles. Il me serait même impossible de dire comment on joue au tiercé ! Sans accroche pour entamer une conversation, je suis là en observateur sans trouver la faille.

Le déclic se produit au bout d'une quinzaine de minutes, quand je reconnais une des personnes présentes dans le bistrot. C'est un ancien gendarme qui travaillait avec mon père et qui est retraité, depuis au moins dix ans. Il ne m'a pas reconnu mais moi, depuis mon entrée au P.M.U., il me semblait que son visage ne m'était pas étranger. Je m'avance vers lui.


« - Vous ne me remettez pas ?  

  - Non pas du tout, t'es qui ?  

-  Je suis le fils du gendarme Eggimann. 

- Oh là là, je ne t'aurais pas reconnu ! Je suis désolé pour toi. Je suis venu aux obsèques de ton père mais à l'instant je ne pensais pas à toi ».


         Une conversation s'engage. Le retraité est content de discuter. On me ressert un panaché. Après les banalités d'usage, je finis par en venir à Gonzalez. Sans entrer dans les détails, ni sur mes activités, ni sur le motif de ma recherche, je lui glisse que j'étais entré dans le bar pour le retrouver. De peur d'éveiller les soupçons, j'invente une histoire de portefeuille perdu. En même temps que je la raconte, je me rends compte qu'elle ne tient pas debout et qu'en bon fils de flic, si j'en avais réellement trouvé un, je l'aurais porté sans tarder à la gendarmerie. A mon grand étonnement pourtant, le subterfuge fonctionne. L'ancien militaire me dit que j'ai bien fait de venir ici car il est là tous les jours mais il se reprend aussitôt en se faisant remarquer à lui-même que finalement, à la réflexion, cela fait plusieurs jours qu'on ne l'a pas vu. Il s'interrompt pour apostropher un homme au comptoir :


«  Le vieux Gonzalez, tu l'as pas vu aujourd'hui ? »


L'autre lui répond que Gonzalez n'est pas très en forme ces derniers temps,  qu'il vient moins au café  mais qu'il fait tellement parti des meubles que l'on ne s'en est pas encore rendu compte.

Le visage de mon interlocuteur s'illumine comme si l'homme auquel il s'était adressé lui avait tenu des propos philosophiques d'une clarté révélatrice. Il me confirme les dires de l'homme accoudé au zinc. Il finit, sans que je lui demande, par m'expliquer qui est Ramon Gonzalez.


« Depuis que je suis à Saint-Saturnin et surtout depuis que je suis veuf, je viens régulièrement ici. Il faut bien passer le temps. Le vieux Gonzalez, je l'ai toujours vu ici. Lui non plus n'a pas de famille. Quand il travaillait, je te parle d'il y a au moins vingt ou trente ans, il passait après sa journée ou le week-end seulement mais depuis qu'il est en retraite, il passe pas mal de temps dans ce bistrot. Il joue beaucoup. Pas des grosses sommes mais ce n'est pas non plus le genre de type qui joue un tiercé de temps à autre notamment quand il y a le prix d'Amérique. Non, lui c'est un joueur régulier comme pas mal de types ici. Il doit y passer une bonne partie de sa pension. Moi, je joue un peu pour m'amuser mais ça n'a rien à voir avec lui. En fait, hormis le fait qu'il soit communiste, c'est un brave gars. Moi, les cocos, tu sais, comme ton père, je les aime pas trop, mais lui c'est pas pareil, il n'est pas méchant. »

Notre conversation n'est guère allée plus loin. L'ancien gendarme m'a donné l'adresse approximative de Gonzalez pour que je puisse lui rendre son portefeuille. J'ai fait semblant d'avoir apprécié sa compagnie et pris la direction de la sortie du P.M.U. en me disant que je ne la ferai pas tous les jours, la tournée des bistrots ! Mais dans le cas présent, il n'y avait guère d'autres possibilité pour mener mon enquête. Je suis retourné ensuite à mon local.


Avant d'aller le trouver chez lui, je réfléchis à qui pourrait me donner d'autres informations plus précises. Si comme le dit le vieux gendarme c'est un coco, j'ai l'homme qu'il me faut. Le communiste le plus en vue, ici à Saint-Saturnin, c'est un certain Jean-Marc Vader. Une figure locale, élu au conseil municipal depuis des lustres, opposant historique au maire en place, syndicaliste C.G.T. (comme il se doit), un des rédacteurs d'un petit journal politique qui tire sur tout ce qui bouge à boulets... rouges !

On le voit à peu près tous les samedis matin sur le marché hebdomadaire qui distribue des tracts ou fait la causette en langue d'oc. C'est par cet aspect que je le connais un peu car, amoureux de l'occitan, j'ai toujours eu une oreille attentive à essayer de percevoir des paroles dans cette langue.

 Sans tomber dans la folklorisation de type Alphonse Daudet, je dois bien convenir que les discours marxistes de Jean-Marc Vader assaisonnés à la sauce provençale lui donnent une truculence que déjà son aspect physique avec, notamment, sa barbe grisonnante, pouvait lui offrir.


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21 avril 2008 1 21 /04 /avril /2008 20:33

Je n'ai pas patienté jusqu'au prochain marché du week-end : j'ai trouvé prétexte d'un petit carton livré par erreur pour le P.C. à mon local. Ah ! la force de l'habitude !

 Mon colis sous le bras, j'ai pris la direction de la maison de Vader. Il m'a très bien reçu en m'invitant à prendre un apéritif. Je n'ai pas refusé l'invitation qui me permettrait de faire bifurquer la conversation sur Gonzalez.

Effectivement, après plusieurs minutes de salamalecs d'usage, j'ai embrayé par un prétexte futile sur le vieux Ramon. Le chef de file des cocos locaux m'a corroboré les dires du vieux flic. Première confirmation : Gonzalez n'a pas forcément toute sa tête. Il peut être lucide par moment et déconnecter à d'autres. Sur le plan politique, Vader confirme qu'ils partagent tous les deux les mêmes opinions politiques, à la différence près que Gonzalez a combattu par les armes pour défendre la liberté. On sent une admiration au fur et à mesure du récit sur les faits de guerre connus de l'espagnol. En fait, Vader ne connaît pas les détails mais il sait que Gonzalez a été dans l'armée républicaine et qu'après la défaite il a été emprisonné. Il est incapable d'en dire plus par exemple sur les lieux où il a livré bataille, mais la seule évocation de la guerre d'Espagne semble le bouleverser et l'on peut lire sur son visage des expressions contradictoires d'envie, de joie, de douleur, de peine...

Sur la vie privée de Ramon Gonzalez, le responsable de la cellule de Saint-Saturnin semble ne rien connaître et même s'en désintéresser complètement.

De toute façon pour l'instant, j'en sais assez. Je crois que la personne qui m'éclairera complètement ne pourra être que Ramon Gonzalez lui-même. Il me faudra passer outre les problèmes linguistiques, son âge, ses difficultés, pour percer le mystère. Les différentes conversations que j'ai eues dans les dernières heures m'ont permis d'aiguiser ma curiosité et de renforcer ma motivation sur le fait que je dois aider les autres pour surmonter mes propres problèmes.

Qu'importe si un client m'a transformé, moi écrivain public, en une espèce de détective privé ! Ma conviction est faite, je dois assister Ramon Gonzalez et percer l'énigme de sa fille.


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Sans que j'aille à sa rencontre, c'est lui qui est venu à moi. Ce matin à l'heure de l'ouverture, il patientait le dos appuyé contre le mur de mon local et les deux mains sur sa canne. Une nouvelle fois, je me suis précipité pour le faire entrer.

La première entrevue a, semble-t-il, débloqué la parole chez le vieil espagnol. Un palier a été franchi, il m'ouvre le livre de sa vie comme si j'étais un familier, un proche, un homme de confiance. Ses idées sont plus claires, sa pensée plus lumineuse qu'à notre première rencontre. Je comprends, maintenant qui il est et n'ai plus besoin de poser des questions, ni de l'interrompre pour en savoir plus. Je n'ai qu'à écouter.

Nous franchissons d'emblée les Pyrénées pour atterrir dans sa province natale : les Asturies. Sur sa prime enfance, il est assez peu loquace.

Pauvre mais dans une atmosphère aimante, il vivait heureux dans un foyer de mineurs. Il est le troisième et dernier garçon de la famille. Son père et ses aînés veilleront sur lui.

Il a à peine seize ans quand la guerre civile éclate. Son père et ses deux frères partent sur le front, il reçoit l'ordre de rester auprès de sa mère. Une semaine après leur départ, il désobéit et les rejoint sur le front au Pays basque dans la province voisine. Est-ce un hasard, il est incorporé dans le même bataillon que son père et ses frères à savoir le Ladreda (unité militaire qui ne sera jamais dissoute et durera par les actions de guérilla jusqu'en 1950).

 Mal préparé et surpris par la violence des combats, l'aîné des enfants est tué dans les premières heures des affrontements entre Républicains et Nationalistes. Ramon l'apprend à son arrivée. Le pays basque ne résistera pas très longtemps :  à la fin du printemps 1937, les phalangistes tiennent Bilbao en juin et auparavant les fils Gonzalez ont perdu leur père.

Les deux plus jeunes frères continueront à se battre dans leur région d'origine voisine du Pays basque, les Asturies qui, elles-aussi, finiront par tomber aux mains des hommes de Franco.

Ramon va être fait prisonnier mais avant d'aller croupir dans les geôles de Palencia, il aura encore la douleur de perdre son dernier frère.

Seul survivant masculin de sa famille, après son arrestation il croupira plusieurs années dans la prison du Léon dans cette ville qui avait vu naître en 1208 la première université d'Espagne à l'initiative d'Alphonse VIII.

A l'âge où certains sont étudiants, lui qui était destiné à la mine passera ce que d'aucuns qualifient comme les meilleures années de l'existence, enfermé et confronté aux puces, poux, morpions, et à la tuberculose.

Il n'en sortira que sept ans plus tard. Entre-temps, sa mère, dernier vestige de sa famille, avait succombé aux restrictions, aux épidémies ou au chagrin. Les portes de sa cellule s'ouvriront mais on ne peut pas vraiment parler de libération car il sera intégré dans un bataillon franquiste pour y faire son service militaire. La dictature militaire voulait redresser cette jeunesse ennemie pour lui inculquer les idées et préceptes fascistes.

Pour Ramon comme pour beaucoup de ses congénères, l'opération relevait de l'exercice de renégation et avec nombre d'entre eux, il préférera fuir et passer clandestinement les Pyrénées à pied.

L'arrivée et l'accueil en France qui sortait, depuis à peine quelques jours de la seconde guerre mondiale, furent difficiles. Il parvint néanmoins jusqu'à Paris où il vivota pendant quelques mois.

Finalement, avec d'autres camarades, ils optèrent pour un départ en Argentine, pays dont ils maîtrisaient la langue et où certains avaient déjà un brin de famille ou de connaissance. Au Havre ce fut l'embarcation clandestine sur un bateau en partance. Au bout de quelques heures, ils furent découverts par l'équipage, des danois qui les traitèrent correctement, ce qui n'est pas toujours le cas pour les passagers qui n'ont pas acquitté leur titre de transport. Cependant leur plus grande surprise restait à venir. On leur expliqua que le bateau ne se dirigeait pas vers l'Argentine, car la destination finale se trouvait de l'autre côté de la Méditerranée dans un département français : l'Algérie. Ils purent se consoler pendant la traversée en dégustant des rollmops avec des patates, nourriture de l'ensemble des bordées.

Les hasards font quelquefois l'Histoire, en l'occurrence une erreur de navire envoya notre Ramon pour une dizaine d'années dans la colonie française. Là commença sa reconversion, d'apprenti-mineur, il devint ouvrier du bâtiment tâtant selon la demande et les circonstances,  la pelle du terrassier, le serre-joint du coffreur, la truelle du maçon ou la taloche du plâtrier.

Certains de ses amis avaient repris un bateau pour le pays initialement prévu, lui, sans trop savoir pourquoi, demeura sans vraiment être intégré à l'une ou l'autre des communautés. Son physique de brun hâlé hérité de quelques siècles de domination musulmane sur la péninsule ibérique le faisait passer pour un Arabe mais ces derniers ne s'y trompaient pas. Huit ans s'écoulèrent encore jusqu'au début de ce que les officiers en France appelèrent les « événements d'Algérie ».

Ni arabe, ni français, ne se sentant à l'aise nulle part, il fit le chemin inverse pour échouer à Marseille...


J'écoute cet itinéraire avec intérêt, ne pouvant m'empêcher de faire le rapprochement avec celui que m'avait conté Frédéric sur Benjamin Péret. Finalement, les deux hommes ont eu un parcours semblable. En 1936 au coup d'état franquiste, il s'était rendu à Barcelone où il rencontra la peintre Remedios Varo qui devint sa compagne. Il travailla ensuite à la radio du P.O.U.M. puis partit combattre sur le front d'Aragon. En 1937 il s'engagera dans le bataillon Nestor Makhno de la célèbre Colonne Durruti. Quand il comprendra que les divisions internes des Républicains entre communistes staliniens et anarchistes vont entraîner la défaite, il repartira vers Paris avant de partir quelques temps au Mexique.


Il me plaît de penser que ces deux hommes auraient pu se rencontrer quelque part au Nord de l'Espagne. Cela semble impossible et, sans le lui demander bien sûr car la question serait complètement saugrenue, j'ai la conviction que Gonzalez ne sait qui pouvait être cet homme. Je ne lui en veux pas, je comprends les raisons de son ignorance. Mon regret, c'est de penser que Benjamin Péret devait écrire pour des gens comme Gonzalez, qui, du haut de leur seize ans, ont pris les fusils pour défendre un idéal. Et pendant que le jeune Ramon souffrait dans sa prison de Palencia en 1938, Péret adhérait à son retour d'Espagne à la F.I.A.R.I., la fédération internationale de l'art révolutionnaire indépendant qui avait été créée par Breton et Trotsky.

Au moment d'évoquer son arrivée à Marseille, Gonzalez fait une pause. Il me demande un verre d'eau que je lui sers illico et il sort de sa poche un de ses ninas qu'il fume en silence. C'est à ce moment là que mon esprit vagabonde sur la guerre d'Espagne de Benjamin Péret.

Son cigare terminé, il avale une dernière gorgée avant de poursuivre le fil de son récit. Il m'explique que sa vie à Marseille fut au début un peu meilleure que celle qu'il avait vécue auparavant. Toutefois il nuance son propos en lâchant une formule cinglante qui traduit bien le désespoir que peut porter un homme comme lui :


« Quand vous avez presque trente ans, que vous n'avez plus de famille, que vous avez perdu une guerre, que vous avez été obligé de fuir votre pays et que vous n'êtes nulle part bien reçu, vous ne vous sentez pas vraiment bien dans votre peau... ».

Je ne sais plus si c'est exactement les mots qu'il a prononcés, en tout cas, l'idée majeure est fidèle.

Il me raconte ensuite la vie d'un immigré dans les années cinquante : beaucoup de travail, peu de loisirs. Pour enfoncer le clou de ces paroles précédentes, il convient qu'il valait mieux qu'il n'eût pas trop de temps libre à cette époque car, selon ses dires, il aimait trop le vin rouge. Quand il ne bossait pas, il devait être submergé par ses démons et ne trouvait refuge que dans la boisson pour essayer d'alléger ses souffrances et tromper sa solitude.


Sentant qu'il commence à fléchir, que sa guerre lui revient sans mal mais que les années qui suivent semblent être paradoxalement moins faciles à exprimer, je suis tenté de l'aider en lui rappelant qu'à sa première visite il m'a contacté à propos de sa fille. J'essaye donc de le faire parler sur sa famille. L'idée qui me paraissait bonne s'avère un fiasco. Il commence, comme la fois précédente, à se perdre dans son récit, à s'énerver et à injurier sa femme. Je finis par comprendre que son épouse a disparu un jour sans laisser d'adresse, en emmenant leur petite.


Voilà qui devient plus clair : j'ai quelques éléments qui prouvent que le vieux ne perd pas complètement les pédales et que son histoire a un sens même si, entre son arrivée à Marseille et la disparition de la femme et de l'enfant, je n'ai aucune information à me mettre sous la dent.

Notre entretien dure encore quelques minutes pendant lesquelles je n'arrive pas à soutirer à Ramon Gonzalez la moindre information. Je manque d'habitude, je ne suis pas un vrai détective privé, je revendique un titre d'écrivain public qui n'a pas la moindre expérience. Le vieil espagnol commence à perdre patience, pour lui les choses sont claires, il faut que je retrouve sa fille.

Enfin, non sans mal, il finit par me donner son adresse à l'époque où il vivait à Marseille : « rue des moulins ». Bien que ce soit une information qui remonte à une quarantaine d'années il se souvient même du numéro mais je n'en saurai pas plus pour l'instant. Je devrai m'en contenter.


Il fallait s'y attendre, si cet enfant pouvait être retrouvée facilement, Gonzalez n'aurait pas eu besoin de mon aide. S'il insiste sur le détective privé plutôt que sur l'écrivain public, il a ses raisons. Il connaît les obstacles et les difficultés qu'il faudra surmonter pour se mettre sur la piste de sa descendante. Je vais relever le défi, je joue le jeu, je ne trahirai pas la confiance que j'ai eu l'honneur de recevoir.


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Un seul et unique client mais qui m'occupe à plein temps. Je ne crois pas qu'ouvrir un espace d'écrivain public ait été une si bonne idée que ça.

Après le départ du vieil espagnol, je n'ai pas vu l'ombre du moindre curieux qui aurait esquissé un tout petit temps d'arrêt sur la devanture de mon échoppe montrant par ce geste un semblant d'intérêt pour mon travail et qui laisserait présager que dans les jours à venir les affaires vont démarrer. Il est peut-être un peu tôt pour tirer une conclusion définitive mais à la fin de la semaine s'il n'y a rien de nouveau sous le soleil de Saint-Saturnin, direction : la cité phocéenne sur les traces de Gonzalez !


En attendant, pour meubler la soirée et faire venir le sommeil, je vais aux nouvelles de la tante Marie-Sybille sur la toile. Aujourd'hui le texte est intitulé « la folle du régiment », tout un programme.

 

Dans une précédente chronique, je vous ai conté mes aventures dans mon jeune temps à l'époque où j'usais mes fonds de petites culottes sur les bancs du collège. Quelques années plus tard, j'avais l'insigne honneur de servir la France ou plutôt la Ffrance et d'être incorporé dans un corps de l'armée de terre. J'ai bien dit « incorporé » comme on le fait pour un aliment dans une recette de cuisine et non introduit. Petits vicieux ! De nos jours, les jeunes gens n'ont pas la joie de se retrouver entre garçons pendant un an, partageant le gîte et le couvert. Si l'on veut tâter d'une telle expérience, il faut fréquenter les scouts ou les éclaireurs pour avoir la chance de dormir dans la même tente qu'un jeune homme de son âge ou qu'un vieux curé libidineux.

Ah ! quelle chance ! se lever aux aurores au son du doux clairon,  courir dans la nature par grand froid avec seulement un petit short et un léger tee-shirt comme l'auraient fait nos sympathiques prédécesseurs de Sparte, s'astiquer le fusil jusqu'à le faire reluire et l'oindre d'une huile sensuelle,  se rouler à plusieurs dans une terre fangeuse sous une herse de barbelés que même les pires sado-masos redouteraient. Enfin, que des plaisirs comme on les aime ! Les joies du plein-air qui revivifient et de sains exercices qui tonifient le corps sans embarrasser le cerveau...

 Voilà pour le dehors, à l'intérieur tout était à l'avenant, de petites activités dignes d'une bonne maîtresse de maison, comme le nettoyage des sanitaires que certains farceurs s'évertuaient à barbouiller de merde pour tester nos compétences en ménage, quelques corvées de cuisine pour se couper la faim certainement dans le but louable de ne pas trop prendre de kilos superflus, et l'entretien de la chambrée qui va du balayage du sol, au lit au carré, en passant par le rangement impeccable de l'armoire. Que de souvenirs émus comme ce jour où, le lieutenant passant en revue notre carrée en gants blancs pour traquer le moindre grain de poussière, nous nous aperçûmes, en sa présence, que nous avions oublié de passer le chiffon sur un rebord de fenêtre. Heureusement il n'y vit que du feu mais nous étions tous tremblants à l'idée qu'il allait découvrir une occasion de nous châtier comme des vilains petits soldats !...

 J'ai vu de virils hommes devenir esclaves de leurs brodequins. A force de les cirer, il leur fallait toujours une chiffonnette à proximité pour faire luire le dessus et le coup de pied afin qu'ils puissent, comme Narcisse admirer leur reflet dans le bout de leurs chaussures...

Un adjudant attentionné ayant remarqué mes manières, m'avait fait affecter à la chambre des plus loulous et malfrats de la caserne afin que la poule au contact des renards et des loups soit sous leur protection. Il avait vu juste. Je devins la mascotte de l'équipe et gare à celui qui aurait eu l'intention de me faire du mal.

 Seulement mes nouveaux amis n'avaient rien trouvé de mieux que de vouloir refaire mon éducation. Il faut dire qu'eux en avaient reçu une bonne : mon voisin immédiat de lit trafiquait le cannabis et les autoradios. Eh oui ! mes amis, je vous parle d'un temps où les téléphones  portables n'existaient pas et où le must du must en matière de technologie se trouvait sous les tableaux de bord des voitures ! Le second de mes collègues était expert dans le vol justement des automobiles. L'homme idéal quand vous avez oublié vos clefs, qui, avec un cintre vous ouvre votre véhicule en moins de trente secondes ! Le troisième ne savait pas revenir des courses sans avoir sur lui plus d'objets que dans son panier ou chariot. De braves garçons au demeurant mais qui ne s'embarrassaient pas avec des principes d'honnêteté : ils en avaient d'autre, un code d'honneur avec ses qualités, où l'amitié tenait une place importante.

Malgré mes différences, ils m'avaient adopté et me considéraient des leurs. Le hic (car il y en a toujours un) résidait dans le fait que je devais changer mes manières pour que je puisse sortir en ville avec eux sans leur faire honte. A mon arrivée on m'avait appris à marcher au pas. Ce n'est déjà pas facile, mais eux voulurent me faire avancer droit. Je m'explique. Ils avaient remarqué que j'avais tendance à tortiller du popotin et donc à avancer non de façon rectiligne mais en dessinant des méandres telle la couleuvre dans la garrigue.

En début de soirée, j'avais droit à mon exercice de marche dans le couloir avec obligation de respecter la ligne représentée par les dessins du carrelage. J'essayai, sans protester, de faire plaisir à mes camarades et de m'appliquer de mon mieux mais au bout de quelques séances, ils abandonnèrent leur entreprise.

Je ne sais pas trop si la fin des travaux pratiques correspondit à des progrès de ma part dans le déhanchement de mon arrière train ou à leur seuil de tolérance devenu plus élevé. J'ai quand même ma petite idée. Toujours est-il que ma démarche caractéristique me valut le surnom de la « folle du régiment », titre honorifique qui ne me créa néanmoins pas de problèmes car ma protection était bien assurée. Que sont devenus mes anges-gardiens ? Il me plairait de le savoir.

Voilà, c'était la chronique bêtement nostalgique sur le service militaire de Tante Marie-Sybille. Arrivé à un certain âge on finit par avoir un regard attendri sur l'époque où l'on avait vingt ans, quelle drôle de coutume ! Je n'échappe pas à ce comportement régressif alors il vaut mieux que je me taise avant de dire des bêtises !

Ne soyez pas inquiets ni tristes, on se retrouvera bientôt pour de nouvelles aventures...

 

                                                        Signé : Marre ici Bill

  

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20 avril 2008 7 20 /04 /avril /2008 19:24

Chap. 3 « Trois cerises et une sardine »


Comme je l'avais décidé, j'ai fermé la boutique à midi. Dans la norme, un magasin se doit d'être ouvert le samedi après-midi. Pour ma part je ne me considère pas comme un marchand de boîtes de conserve de toute façon, personne n'est venu faire appel à mes services à l'exception de mon seul et unique client, Ramon Gonzalez. Il faut donc que je m'en occupe bien. En fait, je refuse pour l'instant de faire un constat d'échec sur cette aventure d'écrivain public : il est encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives et reconnaître que je me suis trompé est un exercice difficile. Essayons de régler cette affaire, changeons d'air, oublions le passé récent et quand le bilan de cette action sera dressé, on avisera.

J'ai vécu une vingtaine d'années à une centaine de bornes de la cité phocéenne et je n'y avais jamais mis les pieds jusqu'à aujourd'hui. J'ai pris l'autoroute à Orange et je suis arrivé à bon port. C'est d'ailleurs le cas de le dire car en entrant dans la ville on tombe rapidement sur le vieux port. Je ne l'avais vu qu'à la télé ou dans des films.

C'est fou comme on a des clichés sur des lieux. Dans la voiture en venant, je pensais à Marseille en essayant de voir ce que j'en savais. Bien entendu c'est l'histoire mais puis-je parler d'histoire puisque je n'en connais ni le début, ni la fin, ni les tenants, ni les aboutissants, de la sardine qui a bouché le port.

Par association d'idées me vient le recueil de Benjamin Péret paru en 1937 « Trois cerises et une sardine ». Ce livre date du retour de l'écrivain de la guerre d'Espagne qu'il considérait dès cette époque comme perdue et je fais inévitablement le lien avec Ramon Gonzalez qui à ce même moment perdait lui aussi ses illusions en même temps que les membres masculins de sa plus proche famille.


J'essaie de réfléchir à quelque chose que je connaisse de Marseille qui ne soit pas un cliché. Inévitablement le ferry boat de Pagnol, l'O.M de Tapie, Fernandel à l'Alcazar... Rien qui donne l'envie d'aimer cette ville. Je cherche dans le plus récent, les comiques à accent, les bolides des films produits par Besson, toujours rien. La musique, à la rigueur mais je ne suis ni rap ni raggamuffin, ça réduit le choix. Je me creuse encore les méninges pour savoir ce que j'en sais au niveau littéraire. Marseille, comme toutes les villes, doit être plus belle dans les livres que dans la réalité.

Dans la littérature occitane, je ne vois que peu de choses mais je ne connais pas tout. Il y a bien quelques poésies de Pèire Vidal mais ça remonte au Moyen âge. Mistral, poète de la Provence s'il en est, n'a pas eu un regard pour la ville grecque. La campagne a eu ses grâces. Il a chanté Arles mais pas Marseille. Non, je ne vois pas, si ce n'est quelques polars récents de Florian Vernet ou de Claude Barsotti (non ! pas le chanteur ringard, le journaliste de la Marseillaise, le quotidien communiste). Mais c'est sûr je dois avoir des trous dans mon savoir.

Finalement je reste un peu dans le policier puisque je gare mon véhicule dans le parking souterrain qui se trouve derrière l'hôtel de police plus connu sous le nom d'évêché. Je ressors à la surface pour redescendre sur le quai du Port. Je m'arrête dans une maison de la presse pour y acheter une carte de la ville puis je vais m'asseoir à la terrasse d'un de ces cafés qui font face au Vieux Port. J'en profite pour ouvrir mon plan et chercher la rue que m'a indiquée Gonzalez. « rue des moulins », ça t'a un côté typique, cent pour cent Provence. On voit déjà l'ambiance Daudet avec son maître Cornille, sa mule du pape ou son élixir du père Gaucher, du couleur locale, du Peter Meyle avant l'heure. Eh bien ! rien de tout ça ; je finis par trouver dans le dédale horizontal, une petit « rue des Moulins » perpendiculaire à la « rue du Panier » beaucoup plus célèbre au point d'avoir donné son nom au quartier tout entier...

Un coin de la ville qui est bientôt plus célèbre que la cité elle-même. Merci aux polars de Jean-Claude Izzo !

 Longtemps j'ai refusé de lire des romans policiers considérant ce genre comme de la sous littérature. J'avais en tête les S.A.S. et autres San Antonio, sexe et coups de poing, que mon père lisait au W.C. à la maison. De la littérature de chiottes en somme. Quelquefois si c'était du Maurice Leblanc ou du Gaston Leroux, ça pouvait passer pour de la littérature enfantine. Enfin quand ces dames britanniques ou américaines nous brossent des portraits des beaux quartiers et insistent lourdement sur le travail du médecin-légiste, c'est dans le meilleur des cas de la littérature de hall de gare. J'avais comme pour Marseille, des clichés dans la tête mais pas tant que ça finalement. Il a fallu qu'un jour Frédéric me  convainque d'en lire ... pour que je me réconcilie avec le polar. D'ailleurs maintenant que j'y repense quelques jours avant sa mort, Frédéric relisait « le soleil des mourants », j'aurai dû y voir un signal d'alarme.

Comment décrire la prose d'Izzo, à ceux qui n'en auraient jamais entendu parler ? D'abord c'est difficile de ne pas en avoir eu connaissance. Quand même ! Izzo, sans le vouloir a lancé la mode du polar marseillais, il a rendu populaire le quartier du Panier et heureusement pour lui n'a pas vu l'adaptation de Fabio Montale sur T.F.1. Qui a eu l'idée saugrenue de faire jouer le rôle de Fabio Montale, flic marginal, tolérant, ouvert, cabossé par la vie par le comédien à l'ego le plus enflé du monde, réactionnaire, intolérant, en un mot une personnalité aux antipodes de celle du héros de Jean-Claude Izzo ? On se le demande. Que dire de ce téléfilm : un Fabio Montale (Alain Delon) aussi expressif qu'un mannequin en cire des galeries Lafayette, une distribution digne des meilleurs spots publicitaires et pour couronner le tout, un Marseille de carte postale baigné de soleil ! Tout beau, tout propre ! Diffusé juste à temps pour couper l'herbe sous le pied de la version cinématographique d'Alain Bévérini avec dans le rôle de Montale, un Richard Boringer, buriné et écorché vif comme se doit d'être Fabio.

Le « Panier » d'Izzo ce n'est justement pas le « Montmartre » de Marseille et maintenant que j'y monte, j'en ai la confirmation. C'est vieux, c'est moche, les rues sont étroites mais ça vit. On a pas encore chassé les pauvres gens de ce quartier pour qu'ils aillent s'entasser dans une quelconque banlieue. Non sur un devant de porte, un vieux prend le frais alors qu'à quelques encablures de là des enfants jouent au foot dans la rue même. Ni la personne âgée, ni les mômes ne sont vraiment couleur locale. Voilà ce que j'aurai dû dire sur Marseille. Elle n'est pas provençale, elle est un port ouvert sur le monde entier et ceci, depuis toujours. Izzo, lui même fils d'un italien et d'une espagnole l'avait très bien compris et c'est pour ça que sa Marseille résonnait juste dans ses bouquins. Tout le contraire de ce feuilleton télévisé qui veut surfer sur la mode du Panier. J'en parle sans l'avoir vu, les bandes annonces me suffisent. On les connaît ces soaps, avec leurs personnages caricaturaux, leurs dialogues stéréotypés, leurs situations téléphonées, leur esthétique de supermarché. Un Panier en carton pâte entièrement recréé en studio qui n'a ni vie, ni âme.

Je fais durer le plaisir, je ne me rends pas directement à l'adresse que m'a donnée Gonzalez. Je sais maintenant où ça se trouve mais je préfère faire un petit tour dans le quartier, sur les traces de Jean-Claude Izzo en ayant une pensée pour celui qui me l'a fait découvrir. Dans la « montée des Accoules » il y a un santonnier. Qui a dit que l'on était pas en Provence ? Un peu plus loin une « rue des mauvestits », encore une marque occitane dans la toponymie. La « rue du Panier » étroite, napolitaine à souhait. Je ne regrette pas d'être venu.

Enfin la « rue des moulins » et une boutique surannée au titre évocateur « caves des moulins, huiles -vins -savons ». Et oui, en voilà un autre de cliché que j'avais omis de mentionner : le célèbre savon de Marseille.

Un écriteau dans la vitrine en plusieurs langues mais pas en occitan :  en français d'abord « l'art de vivre provençal », puis dessous in english « Provençal way of life ». Italiano « l'arte de vivere provenzale », espanol « el arte de vivir en Provence », german « Leben wie gott in « der Provence ». Le seul hic : pas un seul touriste à l'horizon. A Cannes, à Nice ou en tout point de la côte d'azur ce panneau aurait semblé à sa place, ici il donne l'impression d'être tombé là par accident. Nous sommes à quelques hectomètres du vieux port, de la mairie et pourtant on dirait que l'on en est à la fois très éloigné géographiquement mais aussi que l'on a fait un bond en arrière dans le temps pour revenir à une autre époque. Une Marseille de l'immédiat après-guerre avec des réclames murales aux couleurs passées pour des marques qui n'existent plus, des arrivées de gaz ou d'eau hors d'âge, des volets et des façades défraîchis. Des rues si étroites que les voitures semblent avoir renoncé à y monter. Un silence digne d'une campagne reculée à deux pas du centre-ville.

Je marche dans ce calme en me surprenant à rêver d'être Fabio Montale à la recherche de son enfance et de ses amis voyous. Je finirai par me prendre au jeu du détective privé si je ne me surveille pas. Je ne veux pas me faire passer pour un flic, j'aurais l'impression d'être trahi par mes attitudes, comme si l'ombre de mon père était toujours prête à surgir pour me reprocher de ne pas avoir le profil de l'emploi. Trop pédé pour être gendarme ou policier. En mémoire d'Izzo qui était rédacteur en chef de la Marseillaise, je me ferai passer pour un journaliste de ce même journal. Il faut bien que je trouve quelque chose car j'arrive à l'adresse indiquée par Gonzalez.

Je me souviens parfaitement du numéro de la rue des moulins mais par acquis de conscience, je recherche dans ma poche le papier où j'ai noté les indications du vieil espagnol. C'est bien là.

Une petite maison au même aspect que celles que j'ai vu depuis mon arrivée dans le quartier. Modeste, mal restaurée mais pas à l'abandon. Une minuscule boîte aux lettres que les facteurs considèrent comme en dehors des normes mais qui, dans cette ambiance, va beaucoup mieux qu'irait la réglementaire de la Poste.

 Je vérifie le nom avant de frapper, rien d'hispanique mais plutôt des consonances africaines. On verra bien. Un timide « toc-toc » et une femme vient ouvrir. Légèrement surpris malgré l'avertissement de la boîte aux lettres et peut-être aussi par un boubou très coloré, je bredouille quelques mots maladroits. Je suis prêt à renoncer voyant bien que je suis sur une mauvaise piste.

Enfin puisque je suis là, on ne sait jamais, je fais une tentative. J'explique à la dame que je cherche une famille Gonzalez qui habitait dans cette habitation il y a quelques années. La femme, un tantinet méfiante au premier abord se rend vite compte qu'elle n'a rien à craindre de moi. Elle devient souriante et coopérante. Malheureusement elle ne sait rien. Elle m'expliquera que son mari a racheté cette maison depuis peu et qu'elle ne connaissait rien des précédents occupants. 


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19 avril 2008 6 19 /04 /avril /2008 14:03

Cette 5 ème édition de la Fête de l’Huma Grand Sud promet d’être un grand rassemblement militant, social et festif, avec pour mots d’ordres solidarité et partage.

Au programme stands associatifs et militants, rencontres, débats, mais également une journée de spectacles et concerts.

Programmation musicale :
OJOS DE BRUJO SOUND SYSTEM
ASTONVILLA
ZENZILA
YETI
TIO PEPE
UNE TOUCHE D’OPTIMISME
LES BARBEAUX


Programmes des débats et liste des éditeurs fête huma

 

GALERIE D'ARTISTES:

 

 

Deux peintres seront exposés cette année:  Redouane el Hajam, peintre marocain, et Patrick Singh, peintre de la région ayant réalisé de magnifiques portraits de femmes africaines, et édité aux éditions Domens. Un sculpteur également, Pascal Ciroux, agrémentera le parcours du livre.

 

Patrick Singh

 

Né le 5 mai 1963 à Hyères (Var, France).

Mère française et père anglo-indien.

Passe son enfance et adolescence entre le sud de la France et Londres en Grande-Bretagne.

Fait ses études à Hyères et à Montpellier où il obtient un Diplôme d’Etat aux Fonctions d’Animation (DEFA).

Dans le champ artistique, sa démarche se développe en autodidacte.

Depuis 1997, son parcours est jalonné de nombreuses interventions artistiques sur un plan international (expositions collectives et individuelles, éditions, résidences artistiques en Europe et en Amérique du sud). Ses travaux sont aujourd’hui exposés dans diverses galeries en France et à l’étranger.

 

Lumières noires (black lights)

“ Des êtres qui jaillissent d’une lumière si intense qu’elle en est presque noire, voilà l’une des clés de l’¦uvre de Patrick Singh. La force qui s’en dégage, violente ou noble, captive immanquablement.

Patrick Singh s’est fait connaître par une pratique, rare, du trait de l’encre et du lavis, un dessin maîtrisé, sobre, s’attachant aux visages et aux corps par des saisies fulgurantes, servant une belle démarche d’attention et d’empathie pour des humanités venues du fond des âges et pourtant si actuelles...” Daniel Bégard

 

 













RENCONTRES AVEC
LES AUTEURS DEBATS:

 


16h: "Travailler plus pour vivre moins." - Débat avec Jean-Pierre Barou

Alors que les maladies professionnelles prennent des visages de plus en  plus graves –troubles musculo squelettiques, suicides, dépression,  cancers d’origine professionnelle ;alors que le Conseil Economique et  Social réclame une réforme d’urgence de la médecine du travail ; alors  que le ministère du Travail parle de « travailleurs de force », de  « travailleurs contraints », des « obligés du public », des « plus exposés » ; alors qu’on cherche désormais la respiration de la vie  humaine dans « le temps libre », un syndicaliste, au cœur de toutes les  négociations sur la santé au travail, appelle à rebâtir la valeur travail dans un livre très rigoureusement documenté : A la Reconquête du travail de JF Naton.

Jean-Pierre Barou est écrivain, éditeur (Indigène éditions) et a  été responsable du service social de Libé à sa création, et beaucoup milité en tant que mao. Son dernier livre: "Sartre, le temps des révoltes" (Stock, 2006) .

17h : la littérature pour ados et jeunes adultes

Hicham Charif, qui vient d'être primé en Belgique pour son premier roman, "Les Virus de l'Ombre" (il a reçu le prix Farniente, le plus important des prix belges de littérature jeunesse) et je propose aussi un débat sur la littérature pour ados et jeunes adultes en sa présence et avec Lilian Bathelot, l'auteur Navire moulte fois sélectionné pour des prix pour son "C'est L'Inuit qui gardera le souvenir du Blanc".

18h  Jean-Michel Leterrier


L'auteur: Manoeuvre à 16 ans, Jean-Michel Leterrier travaille 12 ans à l’usine avant de se consacrer à l’action culturelle, puis à l’enseignement. Directeur des affaires culturelles, responsable associatif, permanent syndical, élu politique, il évoque l’apport de ces différentes expériences. C’est la construction de sa propre culture qu’interroge l’auteur, qui explore et dévoile, ce faisant, la genèse des concepts qu’il a forgés, du “Métissage”, au “Complexe de Jdanov”, du “Syndrôme de Chanteclerc”, à la “Parabole de Babel”.

Après le succès du livre de Daniel Pennac "Chagrin d'école", qui décrit le parcours d'un "cancre" qui réussit, je pense qu'un débat sur ces parcours atypiques, cancres qui se révèlent tardivement, ou "autodictates"qui bouleversent les codes sociologiques, justifie un débat sur les modes d'enseignements traditionnels, qui pourraient s'inspirer de ces exemples pour réformer.... "Du coq à l'âne", l'autre Pennac ?

19h: dédicace de Vincent Roussillat illustrateur de  "Les Animaux de la fête occitane » , éditions du Mont.

 

Programmation musicale :
OJOS DE BRUJO SOUND SYSTEM
ASTONVILLA
ZENZILA
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UNE TOUCHE D’OPTIMISME
LES BARBEAUX

voir aussi:
MySpace.com - FETE DE L’HUMANITE GRAND SUD - MONTPELLIER, FR - Alternative - www.myspace.com/fetehuma34
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19 avril 2008 6 19 /04 /avril /2008 07:44

C'était à prévoir. Je repars déçu. En plus je n'ai même pas pu jouer mon numéro du journaliste. Je le regrette car je commence à prendre goût à ce petit jeu. Je ne peux pas dire grand jeu d'abord parce que cette expression est souvent précédée du verbe « sortir » et d'autre part car je la laisse à Benjamin Péret. Les homophobes diront que les pédés aiment à se travestir, (dès qu'ils peuvent se transformer en drag-queen ou en folle de carnaval, ils font leur numéro) et que mon père avait bien fait de m'envoyer au foot. Ils ont bien raison et je reste sur ma faim. Je finis de redescendre la rue,  j'ai déjà dans l'idée de reprendre ma voiture, revenir à Saint-Saturnin et expliquer à Gonzalez que je n'ai rien trouvé.

Je suis pris de remords. Je ne peux pas abandonner aussi vite. Je fais demi-tour et retourne dans la « rue du Panier ». Je ne crois pas au surnaturel car comme l'a dit Benjamin Péret dans un de ses poèmes « Je ne pense à dieu qu'en mangeant du chiendent parce que dieu a fait le chiendent à son image.. » mais je suis sûr que de côtoyer l'âme de Jean-Claude Izzo va m'aider et puis je me sens bien dans ce quartier.


J'ai repris ma marche à l'envers sans vraiment de stratégie ni de plan de bataille. Je me laisse mener par mon guide Izzo jusqu'à l'angle de la « rue du Panier » et de la « place des Pistoles ». Ici je ne sais plus où aller. Je suis fatigué. A nouveau me reprend le désir d'envoyer tout ça balader. Ce n'est pas pour moi, je n'ai ni l'étoffe ni l'épaisseur. Arrêtons cette comédie. Mon moral est en train de flancher. Je me sens mal.

Heureusement mon ange gardien m'a laissé devant un café. Je vais pouvoir m'y asseoir, me désaltérer et repartir après ce petit coup de blues. J'entre dans ce bistrot aussi démodé que le reste du quartier. Pour un établissement de ce genre on pourrait dire qu'il est kitsch. Le comptoir, les tables, les chaises, les murs, la peinture rien ne date d'après 196O. Un café comme on en trouvait encore dans les arrières pays du massif central dans les années 80 mais auquel les nouveaux patrons ont eu la judicieuse idée de redonner une décoration plus authentique et plus couleur locale. Point de tout ça ici, le Formica résiste à la double poussée des nouveaux matériaux et de la réhabilitation des bois anciens. Même les jeux électroniques doivent être dans ce lieu depuis belle lurette. Un flipper que les collectionneurs trouveraient digne de figurer dans une expo sur les trente glorieuses et un baby-foot sur lequel on a du mal à reconnaître la couleur des maillots des deux équipes.

Je referme la porte derrière moi. Il n'y a pas foule : quelques vieux tapent le carton sur une table. Sur une seconde ils ne sont même pas assez pour faire une belote. Le patron en marcel négligé feuillette derrière son comptoir l'Equipe. A mon entrée, tout le monde a eu un regard vers moi, comme si une arrivée était un événement. Je me suis assis entre les deux tables occupées et la vie a repris son cours normalement. J'ai demandé un Perrier au barman qui a bien voulu daigner refermer son journal pour me l'apporter. Il a négligemment passé une éponge devant moi comme pour me montrer que j'avais un traitement de faveur par rapport aux habitués. Car il s'agit bien de cela, on voit bien qu'aucun touriste ne s'aventure jamais jusqu'à cette altitude. Je profite de sa présence à mes côtés pour lui poser quelques questions sur les Gonzalez sans me faire passer pour qui que se soit. L'homme, la cinquantaine, marque un temps d'arrêt et c'est lui qui devient tout à coup comédien, me la jouant Raimu sans le faire vraiment exprès. Il fait mine de réfléchir mais très vite signale son ignorance et apostrophe les usagers qui semblaient attendre son signal.

Un des hommes, plus vieux que le patron d'une bonne vingtaine d'années, me demande des précisions. Je réexplique que c'était une famille qui vivait dans la « rue des moulins » dans les années 60-70, qu'il y avait un homme, une femme, une enfant, qu'ils étaient Espagnols. C'est le vieux qui me donne l'emplacement de la maison sans me dire le numéro mais en décrivant bien la même maison que j'ai vue un quart d'heure auparavant.

Je vois qu'il connaît, je veux en avoir confirmation. Avant de continuer il me demande si je suis de la famille. Je dois improviser quelque chose rapidement. Je lui réponds que je travaille pour un notaire qui recherche des héritiers. Cette réplique lui convient, on sent un soulagement. Un sourire apparaît sur son visage. Il semble rassurer que je sois étranger aux Gonzalez car il a des choses, selon ses mots, pas très jolies à raconter. Effectivement il se souvient de cette famille. Surtout de la femme car elle était la maîtresse du patron de ce même café bien des années auparavant. Les autres clients, légèrement plus jeunes, ont entendu parler de cette histoire car quand l'homme commence à l'évoquer j'entends des approbations et des rires à demi-étouffés. Le vieux prend donc à témoin ses acolytes, trop content d'avoir un public et une histoire à raconter. Il explique à la cantonade, presque en m'oubliant que la femme et le patron du bistrot avaient été amants puis, s'interrompant, il finit par avouer qu'il ne sait pas ce qu'est devenue la famille.

Un instant, je crois tenir une piste avec l'ancien patron du bistrot mais le nouveau a déjà désamorcé ce filon en racontant qu'il n'a pas connu la personne en question. Le bar, il a racheté à un autre homme qui a possédé l'établissement entre temps. La trace se perd là.

Finalement, c'est le plus vieux des clients qui a profité de la conversation avec le patron pour se souvenir d'un autre détail d'importance. Il donne un nom à consonance espagnole, précédé d'un article :

« la Carmona , elle, elle saura peut-être vous renseigner, c'est une vieille qui habite toujours le quartier. Elles étaient copines toutes les deux. Je crois qu'elles venaient du même pays ».


Il me donne une description sommaire de la femme et une adresse précise, sans le numéro mais suffisamment claire pour la retrouver facilement.

Je retrouve le moral. Il ne m'en fallait pas beaucoup. Je vais continuer mon enquête. Merci Jean-Claude pour ton aide précieuse !

Je suis quasiment revenu à mon point de départ, à quelques pas de la maison de la femme au boubou. C'est le même style d'habitation, à l'image du quartier : petite bicoque dans une rue étroite. Ce manque de largeur qui donne une chaleur à l'endroit mais qui opprime celui qui vient de l'extérieur. Les Allemands, d'ailleurs, avaient ressenti la même impression.  Devant l'impossibilité de contrôler « le Panier »  à cause de ce dédale de ruelles, ils projetèrent en 1943 de le raser. Heureusement ça ne s'est pas fait...

Je jette un coup d'œil à la boîte aux lettres, vestige de musée qui me confirme que je suis bien chez une Amparo Carmona. Un de ces prénoms espagnols qui semblent de prime abord masculin pour un francophone mais qui sont bel et bien portés par des femmes.

Ce coup-ci, ça y est, je vais le jouer mon personnage de journaliste à la « Mars ». Une vieille entre les soixante dix et les quatre-vingts se présente sur le seuil. On a du mal à croire que c'est elle qui a fait les quatre cents coups avec la femme de Gonzalez.

Même si elle est assez âgée, elle ne semble pas impressionnée, je vois tout de suite que je ne l'inquiète pas. Je lui débite un baratin à propos d'une pseudo enquête sur les immigrés espagnols. Elle semble surprise. Je lui raconte que je cherche un couple qui a habité le quartier et qui portait le nom de Gonzalez. Je vois qu'elle est de plus en plus étonnée mais je ne comprends pas pourquoi. Je commence à douter de la qualité de mon jeu de comédien. En fait, il n'en est rien. Elle trouve bizarre que je sois la seconde personne en quelques jours à s'intéresser aux Gonzalez.

En effet, elle m'explique que deux ou trois jours auparavant un Espagnol est venu l'interroger sur ses anciens voisins. Elle se demande pourquoi tout à coup, alors qu'ils sont partis depuis des années, tout le monde s'intéresse à la famille Gonzalez. Un peu pris de court, j'invente une histoire de parenté avec l'ancien ministre espagnol Felipe Gonzalez. En la disant, je me dis que, si on me la racontait à moi, je n'en croirai pas un mot. Il semble pourtant que la vieille gobe ma version. Cependant elle ne peut s'empêcher d'ajouter qu'ils n'étaient pas bien riches pour avoir un cousin qui allait devenir premier ministre. Je nuance un peu pour m'en sortir : c'étaient des cousins éloignés ! Mais elle ne s'est pas attardée sur cette anecdote, elle est revenue sur le précédent visiteur. Elle vient de se souvenir qu'il lui a laissé ses coordonnées. Elle entre pour les chercher et m'invite à pénétrer dans ses appartements. Décoration : style « la mère à Titi », la chanson de Renaud avec une dominante hispanique voire même andalouse pour être plus précis : éventails et banderilles sur les murs et sur la télé, une coupe avec le torero, le toro et la danseuse de flamenco. Elle fouille un tiroir désordonné et finit par en sortir une carte de visite, elle me la montre. Je peux y lire un nom : Eduardo Cabrera, une profession : arquitecto, et une adresse à Barcelone. J'essaye de mémoriser ces informations, je les noterai une fois sorti de chez la vieille.

Elle semble ne plus être préoccupée par cet autre visiteur et s'autorise enfin à me parler de la famille Gonzalez. Elle ne cherche même pas à savoir qui m'a orienté vers elle. J'aimerais bien qu'elle me le demande, je lui parlerais des gars du café et ça serait l'occasion de savoir qui a guidé l'autre homme dont la présence m'intrigue.

Gonzalez a-t-il embauché plusieurs personnes ? Me cache t-il quelque chose en m'envoyant sur une fausse piste avec son histoire de fille disparue ? Je m'interroge. Je dois interrompre ma réflexion car la senora Carmona commence à raconter ce qu'elle sait. Elle semble heureuse d'en parler comme ces vieux qui n'ont pas de visites et retiennent le facteur ou l'agent d'EDF venu relever le compteur.

Elle m'indique la maison en faisant un geste devant la fenêtre comme si mes yeux pouvaient traverser les murs, précisant qu'ils étaient donc voisins et toutes deux originaires d'Espagne. Elle ajoute que la femme venait du même village qu'elle et que c'était pour ça qu'elles étaient amies. Elle explique ensuite qu'ils ont vécu là relativement longtemps mais qu'ils en sont partis parce que le couple allait mal, ce qui confirme la version que m'ont donnée les clients du bistrot avec l'histoire de la liaison entre elle et le patron du café.

Pour l'instant je n'ai rien appris de nouveau mais elle va assouvir ma curiosité. Visiblement plus intéressée par la piste de la femme de Gonzalez (mais leur lien régional en plus de leur sexe explique bien cela) que par celle de son mari, elle me donne la rue où elle s'est installée avec le cafetier après son départ du domicile conjugal. Comme je suis censé être un journaliste marseillais, je fais semblant de connaître ce coin de la ville même si en réalité ça ne me dit strictement rien. Elle agrémente son récit de souvenirs personnels quand elle allait les voir à l'autre bout de la ville lors de sorties occasionnelles. Elle donne sa version des faits : ils avaient choisi un logement à l'opposé du Panier car ils avaient peur que Gonzalez « fasse un mauvais coup ».

Cette évocation du risque de jalousie du mari et les menaces qu'il aurait pu faire subir au nouveau couple, l'amène à finir son histoire et à évoquer leur mort. Elle raconte qu'ils sont décédés tous les deux : lui depuis longtemps car ils ne se contentaient pas de servir des pastis, il en buvait sa part. Elle, plus récemment, et ne voulant pas l'accabler pour ne pas entacher une amitié de longue date, elle ajoute à mots couverts qu'elle aussi avait un peu trop abusé de la bouteille.

Pour changer de sujet, la vieille Carmona revient sur le Gonzalez. Elle dit ne plus avoir eu de ses nouvelles depuis très, très longtemps se souvenant que le départ de la femme de la maison fut suivi, peu après par celui du mari qui disparut complètement. La vieille espagnole dit ignorer si il était resté sur Marseille ou s'il était parti plus loin. Elle avoue ne jamais en avoir reparlé avec sa copine ou seulement une fois comme ça en passant et n'ayant pas obtenu de réponse claire, elle n'avait pas vraiment cherché à en savoir plus. Un dernier souvenir lui revient : il y avait eu des problèmes avec le courrier dans les mois qui ont suivi le départ du couple de la « rue des moulins » mais elle n'avait jamais su où l'homme était passé.

C'est en évoquant le père qu'elle vient à me parler de la fille. Amparo Carmona n'en a pas parlé jusqu'à maintenant mais y vient. Elle m'explique que les Gonzalez à l'époque où ils vivaient là avaient une petite fille et que peut-être, elle, sait où avait atterri le père. De l'avis de la vieille Espagnol il y a fort à penser que quoi qu'il arrive, il doit être mort, maintenant compte tenu de son âge, mais elle avoue qu'elle ne s'était pas posé la question. C'est la visite de l'architecte barcelonais qui l'a replongée dans cette histoire. Elle finit par regretter d'avoir oublié de lui parler de la fille à Cabrera car sur le coup, surprise, elle n'y a pas pensé. L'habitante du Panier ajoute qu'elle a bien sa carte mais qu'elle ne va pas téléphoner à un inconnu.

En conclusion, mon prédécesseur a défriché la route et c'est moi qui vais avoir l'information pour laquelle j'ai fait le déplacement. La grand-mère andalouse ayant poursuivi sa réflexion me donne un indice de taille. Elle ne sait pas où peut bien vivre la fille des Gonzalez mais Amparo Carmona la voit régulièrement depuis quelques temps dans le quartier, car elle est propriétaire d'une maison sur la « place des Pistoles » qui est en cours de rénovation et y vient souvent pour surveiller l'avancée des travaux. La vieille espagnole commence une explication pour me dire où se trouve la « place des Pistoles », je fais mine de l'écouter mais je sais où c'est puisque j'en viens. Il y a quelques minutes en sortant du café, j'y étais.

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19 avril 2008 6 19 /04 /avril /2008 00:01































Décidément chaque jour qui passe,  l'UMP/MEDEF arrache une page des avantages sociaux pour le plus grand bonheur des actionnaires! après les lunettes, voici les allocations familiales!
La Révision générale des politiques publiques (RGPP) engagée par le gouvernement s’est muée en "Rigueur générale pour le peuple"

Une semaine après les attaques sur la carte familles nombreuses, le gouvernement s’en est pris au versement des allocations versées aux parents d’adolescents.
Un décret jusqu’alors passé inaperçu modifie les règles de calcul des allocations familiales, révèle le quotidien "Le Monde".
Le nouveau dispositif, qui concerne plus de 4,5 millions de familles de deux enfants et plus, entrera en vigueur le 1er mai : la majoration n’interviendrait plus au onzième anniversaire d’un enfant, mais à son quatorzième. Le décret permet à la Caisse nationale des allocations familiales de réaliser 138 millions d’économies par an.
Au total, a c
alculé le journal, "sur l’ensemble des versements accordés entre le onzième et le dix-huitième anniversaire, les familles perdront près de 600 euros par enfant".
Matignon a justifié mercredi soir cette baisse par le fait que "d’autres mesures" sont prises pour les familles, notamment la hausse des allocations de garde d’enfant par une assistante maternelle p
our les familles modestes. L’Union des familles en Europe (UFE) rejette l’argument et dénonce "l’arnaque" du gouvernement : l’augmentation de l’allocation de garde d’enfant (Paje) coûtera 35 millions d’euros, "versus 138 millions d’économie" dues à la réforme des allocations familiales, "cherchez l’arnaque !", lance l’association familiale.

Signe du malaise, le décret qui doit lancer la majoration unique des allocations familiales à 1
4 ans, n’est pas encore paru, alors que la mesure doit en principe entrer en vigueur le 1er mai.
A droite aussi, la mesure interpelle. Le député UMP du Maine-et-Loire Hervé de Charette estime que la mesure "ne peut pas être maintenue en l’état" et dénonce les approximations du gouvernement: "La semaine dernière, c’était la carte familles nombreuses, dimanche le remboursement des lunettes, lundi les conditions d’indemnisation des chômeurs, mardi les allocations familiales… C’est un gouvernment à hue et à couacs", accuse-t-il.
C’est maintenant au tour des allocations familiales de passer au tamis de l’austérité .  La conséqu
ence de cette politique inégalitaire sera une vie encore plus difficile pour bon nombre de familles. La CGT regrette aujourd’hui ce nouveau "coup" infligé au pouvoir d’achat des familles, la CFE-CGC critique ce "recul des prestations familiales, qui sont déjà insuffisantes", et l’Union des familles en Europe juge cette économie "inacceptable".


C'EST POUR QUAND? LE DRAME C'EST QUE PAS PLUS QU'EN 1968, IL N'Y A D'ALTERNATIVE POLITIQUE SUR UN PROJET VALIDE PAR LE PEUPLE!
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18 avril 2008 5 18 /04 /avril /2008 07:45

J'y remonte avec un sentiment d'excitation à l'opposé de ce que je ressentais il y a encore quelques minutes. Tout alsacien que je suis, j'ai le caractère versatile du marseillais, enfin de la caricature que l'on en fait, un demi-italien qui passe du rire aux larmes en un instant. Si je ne me surveille pas, je vais finir par avoir moi-aussi une fausse idée des habitants de la cité phocéenne. C'est d'autant plus dur de résister quand une bonne partie des « méridionaux » se parodient eux-mêmes comme pour donner raison à ceux qui les raillent. On est rassuré lorsque l'on peut entrer dans une case, je ne le sais que trop car les pédés se laissent souvent enfermer dans ces jeux de rôle. Pour ma part, je m'y refuse, donc je dois être attentif à ne pas pratiquer ce genre de ségrégation.

Le temps de réfléchir à ces petites considérations qui ne sont pas des détails et me voilà à nouveau sur cette place des Pistoles. Elle détonne dans ce quartier qui, comme j'ai pu le constater, est vieux, moche, étroit, populaire, sinueux. Ici une place relativement large, un parking, alors que le reste du Panier semble un remède au tout automobile. Des maisons plus belles, mieux rénovées, et surtout qui sentent moins cette misère qui exhale des ruelles sombres de ce coin si cher à Izzo mais que peu pourraient décrire comme beau. Ce qui frappe le plus quand on pénètre sur cette « place des Pistoles » c'est la lumière, le jour, la clarté. Dans cette ville pourtant si méditerranéenne, il semblerait que l'astre solaire refuse de briller entre la « montée des Accoules », la « rue des moulins » et la « rue du Panier », et, tout à coup, il explose « Place des Pistoles ».

Je soupçonne les bulldozers de l'avoir un peu aidé à pénétrer là en ayant fait tomber quelques pans de murs de maisons délabrées, insalubres ou tout simplement à l'image de celle du quartier. Un début d'épidémie de foyer hausmannien dans une partie de la ville qui semblait immunisée jusqu'à maintenant.

Je veux avoir confirmation des dires de la vieille espagnole. J'entreprends donc une visite attentive. 

Mon premier regard est confirmé par l'inspection détaillée. En quelques mètres on est passé du quartier populaire et vieillot à un espace qui se veut résolument plus chic, un rien branché, avant-goût de ce que deviendra le Panier si on y laisse pénétrer les promoteurs. Marseille est une des grandes villes qui n'a pas encore éradiqué ses pauvres du centre ville : pour combien de temps ? Le poison a été inoculé sur la place des Pistoles, quelques gouttes de T.G.V. Méditerranée, un zeste d'ITER, un soupçon de mode et le Panier perdra son âme. Bien entendu, les plus pauvres en feront les frais... mais je suis certainement un rabat-joie qui ne peut s'empêcher de gâcher la fête.

La rénovation de la place est quasiment terminée. Il a bien cependant un échafaudage sur une baraque en cours de ravalement. Manque de bol, les travaux semblent à l'arrêt, du moins ce jour. Je m'avance pour avoir la confirmation qu'il n'y a vraiment personne. C'est le cas. La seule indication qui pourra me faire avancer dans mon enquête : le panneau informant de la régularité des travaux. Un instant, j'ai la naïveté de croire que le nom de la fille de Gonzalez va me tomber tout cuit dans l'escarcelle mais très vite c'est la déception. Le propriétaire n'est pas mentionné sous la forme d'un nom de famille mais sous les coordonnées d'une S.C.I.

Je n'y connais rien en droit mais il me semble que sous ce sigle se cache une Société Civile Immobilière. Cette entité est baptisée d'un nom grec : Gaïa. J'ai toujours été étonné que les entreprises ou les commerces portent des noms chargées de mythologie, de culture, de poésie alors que la plupart du temps elles ont des activités qui contredisent le développement harmonieux de l'être humain.

Qui se cache derrière cette Gaïa ? Je relève quelques numéros et autres informations sur le tableau des travaux dont je ne saisis pas toutes les significations et décide de repartir car je pense que j'en saurai pas plus pour aujourd'hui. Mais je n'arrive pas à quitter le Panier sur cette dernière impression. Je vais refaire un dernier tour en rejoignant le parking souterrain et ma voiture. Pour ne pas repasser par les mêmes rues, pour ne pas retomber sur les gens que j'ai interrogé mais aussi par volonté de connaître le reste du quartier, je prends un nouvel itinéraire. Toujours un serpentin de ruelles qui ressemblent comme deux gouttes d'eau à celles dans lesquelles j'ai passé mon après-midi puis soudain, juste avant d'arriver à l'endroit où j'ai garé mon véhicule, une autre place qui n'a rien à voir ni avec la « rue du Panier » ni avec la « place des Pistoles », un lieu qui date d'une autre époque, beaucoup plus récente mais que j'ai du mal à dater. Les années cinquante, soixante, soixante-dix ? Il faudrait demander à un spécialiste de l'architecture comme le présentateur de la radio publique pour avoir une information précise ! Toujours est-il que je tombe sur un endroit plus moderne avec des bâtiments en carré autour d'une place qui n'a pas de cachet. Un espace qui forme une sorte de cour intérieure à un ensemble immobilier de plusieurs étages d'inspiration contemporaine, certainement plus confortable que le Panier mais qui paraît bien fade. Dernière désagréable surprise quand devant le panneau mural qui annonce le nom de l'endroit, je constate avec stupéfaction que je suis sur la « place Victor Gélu ».

Tout à l'heure, en venant dans la voiture, je recherchais un homme qui symbolise Marseille. Je l'avais oublié, comme en ont fait malheureusement de même je pense, nombre de marseillais. Moi, j'ai une excuse, eux, ils n'en ont pas. Bien sûr c'est un homme du dix-neuvième siècle et il a écrit en langue d'oc. Par dessus le marché, les Allemands ont fait fondre sa statue pendant la guerre pour en récupérer le métal. Toutefois des milliers de personnes passent chaque jour devant une plaque commémorative sur le Vieux Port mais visiblement ça ne suffit pas pour que son souvenir ressurgisse dans la mémoire collective.

Décidément, les Provençaux en font trop pour Mistral, aussi grand soit son talent, en lui rendant un culte quasi stalinien au détriment d'autres. L'auteur de « Nouvé Granet » et de « fénians e Groumans » mériterait plus d'attention et surtout, lui qui dénonçait, sans éloge d'un passéisme, les travers du progrès devrait avoir son nom dans une rue du Panier qui sente bon le prolo. C'est avec cette pensée pour Gélu que je quitte Marseille.

J'en ai assez vu. Direction Saint-Saturnin. Chemin inverse, un peu plus d'une heure pour gamberger. J'ai la tête pleine des visages des gens du Panier qui correspondaient au portrait qu'en faisait Izzo. Je n'ai pas été déçu sur ce plan là. Pour ce qui est des raisons qui m'ont amené à Marseille, évidemment c'est selon l'optimisme ou le pessimisme de rigueur une bouteille à moitié pleine ou vide.

J'ai eu confirmation que Gonzalez ne m'a pas « tiré des craques » (mais était-ce son intérêt ?) et suis arrivé à retrouver les traces de son passage avec sa petite famille même si la piste n'a pas complètement abouti. Mon seul indice conséquent est le nom de cette fameuse S.C.I., « Gaïa ». Un amateur de culture hellène, juste retour des choses en somme dans la cité phocéenne, ou tout simplement quelqu'un qui veut se donner un genre du style « regardez mes lettres classiques, j'ai fait mes humanités, moi ! ».

Il faudra que j'aie des réponses à cette interrogation. Cependant une autre question me taraude : qui est cet individu qui m'a devancé chez la vieille espagnole et quelles sont ses motivations ? Il faudra que j'en parle à Gonzalez qui pourra, je l'espère, m'éclairer sur le sujet car j'ai beau retourner ce problème dans tous les sens, je ne comprends pas le rôle que joue ce soi-disant architecte catalan dans cette histoire.

J'ai réintégré mon pavillon déprimant. Je retrouve mes pénates dans cette ville qui s'est auto-attribuée le titre de « Portes d'or de Provence ». Aujourd'hui je serai passé de la Provence maritime aux « frontières » sans avoir vraiment senti une différence. Décidément le concept de Provence n'a pas de sens et c'est dommage que le vocable Occitanie ne trouve pas grâce à l'est du Rhône.

Je me fais un plateau repas et me précipite vers mon ordinateur. Une seule idée en tête : mettre un nom sur cette S.C.I. On trouve de tout sur Internet, le plus bizarre c'est que ça ne déclenche pas de révolutions. On aurait pourtant tous les arguments en main pour instruire les peuples. Dans le monde des affaires, même si la transparence n'est pas la règle numéro un dans ce milieu, on arrive avec par exemple les registres du commerce, des tribunaux, des sites de courtages, des entreprises de consulting et autres, à en savoir plus que les patrons voudraient bien le dire si on les interrogeait. Je ne suis pas spécialiste, loin de là. Je patine donc un peu mais j'y passerai la nuit s'il le faut. Je n'irai pas rejoindre Morphée avant de savoir qui est à la tête de cette S.C.I. Je tâtonne,  j'avance, lentement certes, mais je progresse. L'étau se resserre. Enfin au bout de plusieurs heures de combat entre ma souris, mon clavier, mon écran et moi, je finis par mettre le grappin sur un nom et une commune. Bernard Montbrun, Boulvezon.


Sur l'instant Boulvezon ne fait aucun écho en moi. Puis à la réflexion, je me souviens d'un village que je ne sais plus très bien placer. On ne connaît jamais assez sa géographie. Je suis capable de dire néanmoins que ça se situe quelque part dans un triangle formé par les Alpilles, la Crau et la Camargue, entre Durance et Rhône. Pour plus de précision, il me faudra regarder une carte. Pour l'instant je me contente d'à peu près. Je sais que j'ai un fil à tirer, peu importe les détails. Demain il fera jour. Quant à ce monsieur Bernard Montbrun, en revanche, son patronyme ne me dit absolument rien et quoi de plus normal, puisque c'est la situation inverse qui aurait relevé du hasard ou du coup de bol. Cependant, mon ignorance n'a aucun caractère de gravité. Après le samedi, vient le dimanche qui est un jour idéal pour se promener dans les rue de Boulvezon.

 L'avantage avec ce nouveau job qui m'occupe même le week-end c'est que je n'ai plus de temps pour déprimer.

Avant d'aller au lit, après une journée et une soirée fertiles en rebondissements, je vais quand même, puisque je suis déjà devant l'ordinateur, me détendre un peu en surfant sur autre chose que les entreprises et autres sociétés immobilières. Allons voir ce que notre Tante Marie-Sybille aura inventé pour nous faire rire aujourd'hui.


Comme toujours le titre même de la chronique renvoie à une référence de la télé, la chanson ou le cinéma. Cette fois encore, on y coupe pas : « Le mari de la coiffeuse »


Vous ai-je raconté mes débuts professionnels ? Je ne crois pas et je vais rattraper cette erreur sur le champ.

Etre homo, ça cause un certain nombre de tourments mais à coup sûr, c'est un avantage dans le monde du travail. Bien entendu, pas pour faire manœuvre ou docker car dans le premier cas on se salit les ongles et dans le second on ne peut porter des talons, mais dans bien des métiers, notre créativité, notre sensibilité, notre goût sont un avantage car c'est bien connu les hétéros ne sont ni imaginatifs, ni raffinés et manquent de fantaisie. Je sais, je sais, je caricature un peu... mais à peine. Toujours est-il que la dame du C.I.O., vous savez, non pas le « Comité International Olympique » mais le « Centre d'Information et d'Orientation » a tout de suite vu que je pourrais me trouver bien dans un salon de coiffure. Et allez savoir pourquoi j'ai trouvé que c'était une bonne idée d'ailleurs peut-être que c'est moi qui ai avancé cette proposition.

Et me voilà embarqué la rentrée scolaire suivante dans un centre pour apprentis où je me retrouvais au milieu de filles. Le rêve quoi ! Enfin dans mon monde ! Je partageais mon temps à l'école avec mes copines à apprendre les rudiments du métier et dans un salon que ma mère m'avait trouvé. La première année on ne me laissa jamais toucher des ciseaux, mon travail consistait à faire les shampooings et à balayer les cheveux coupés. Et pourtant je me trouvais bien dans cet univers. Les conversations étaient superficielles comme je les aimais. Timide, je me contentais le plus souvent d'écouter et d'apprendre. Il ne semble pas mais tenir le crachoir à une cliente est un exercice difficile. Il faut être capable de parler de tout et de rien, surtout de rien d'ailleurs. Eviter les sujets qui peuvent amener la polémique, la politique par exemple est à proscrire. Ca tombe bien : c'est pour moi un monde aussi étrange que les extra-terrestres. Mais ce n'est pas tout, il faut pouvoir avoir une conversation qui ne doit pas froisser la personne assise sur le fauteuil. Si pour rompre le silence, elle vous a fait la confidence qu'elle ne se trouvait pas belle avec sa coupe actuelle, on doit être en mesure de lui expliquer que ce n'est pas vrai tout en justifiant qu'elle a bien fait de venir car elle sera beaucoup mieux après. Si dans un cri du cœur, vous lui avez donné raison en argumentant et en la traitant de laideron, ne vous inquiétez pas pour sa carte de fidélité, vous ne la reverrez jamais. Autre écueil à éviter, parler d'autres personnes sans les dénigrer. Si, une fois que la mère Michu a franchi la porte, vous commencez à déblatérer sur son compte, la dame que vous avez entre les mains, pourra penser à juste raison que vous en ferez de même quand, elle-aussi, aura tourné les talons. Et puis, dans les petites villes, tout le monde se connaît et la moindre réflexion anodine sur un quidam quelconque aura un écho chez un voisin, un ami, un parent... Voilà pourquoi, quand vous sortez de chez le coiffeur, il vous semble, compte-tenu des paroles entendues, que vous avez un Q.I. largement au-dessus de la moyenne. C'est un travail, messieurs, dames. Moi, par exemple, je pourrais de mémoire vous raconter par le menu l'accident de Lady Di sous le pont de l'Alma et vous faire l'inventaire de l'estomac de Monsieur Paul le chauffeur de feu la princesse de Galles. Voilà une preuve de professionnalisme. Autre exercice : noms et pedigrees des amants des filles de Rainier de Monaco dans l'ordre chronologique et la cause de la mort de ceux qui n'ont pas résisté. Il est temps de rendre un hommage sincère aux magazines People qui nous permettent d'exercer notre noble métier de la meilleure des façons.

 

Après une année de shampooing et de basses besognes, je fus autorisé à faire ma première coupe. Quel grand jour ! Il faut dire qu'outre des progrès réels, ma promotion dans la hiérarchie de la coiffure a été peut-être accélérée par le fait que je sois devenu l'amant du patron du salon. Un pauvre homme qui avait nié pendant des années sa réalité sexuelle et qui était marié et père de famille. Imaginez le scandale quand le mâle se laissa aller à son instinct naturel, entraîna l'apprenti dans son lit et surtout en sortit sa femme. L'affluence de la clientèle s'en ressentit quelques temps avant que le monde s'habitue à cette nouvelle situation. Finalement on accepta le comportement de l'homme puisqu'il était coiffeur pour dames donc forcément c'était parce que... Et oui, les clichés ! toujours les clichés. En tout cas, voilà comment je suis devenu le « mari de la coiffeuse », surnom qui me colla à la peau pendant quelques années avant que je ne fasse autre chose. Mais ceci fera certainement l'objet d'une prochaine communication de votre Tante Marie-Sybille dont, j'en suis sûr, vous mourez d'impatience de suivre les nouvelles aventures !



                                                        signé : Marri si bile

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